Les composés chimiques et biochimiques dans les eaux souterraines déterminent son utilité pour l’industrie, l’agriculture et pour l’usage domestique. Les composés dissous dans l’eau apportent des indices sur son histoire géologique, son influence sur le sol ou les formations à travers lesquelles elle est passée, la présence de gisements et son origine à travers le cycle hydrologique. Les processus chimiques dans les eaux souterraines peuvent influencer la dureté des matériaux géologiques, et dans la situation ou ils ne sont pas identifiés, peuvent provoquer des effondrements de pentes artificielles, barrages, excavations minières et autres caractéristiques importantes pour l’homme. Il devient de plus en plus commun de voir les déchets de l’industrie, de l’agriculture et les déchets domestiques stockés ou déposés a la surface ou sous le sol. Ceci peut être une pratique sure comme dangereuse, dont les conséquences dépendent largement des processus chimiques et microbiologiques dans les eaux souterraines. Dans l’étude de l’évolution des paysages, l’hypothèse communément faite est que les processus physiques tels que l’érosion mécanique, la dilatation et la contraction thermique, la cryoclastie et les glissements de terrain sont les influences dominantes, mais avec un examen plus minutieux, il a souvent été montré que les processus chimiques dans les eaux souterraines sont les facteurs dominants.
Le but de ce chapitre est de décrire les propriétés chimiques et les principes qui contrôlent le comportement des éléments dissous dans les eaux souterraines. Une compréhension plus complète de l’étude et de l’interprétation des caractéristiques chimiques dans les eaux naturelles est donnée par Hem (1970) et par Sturm et Morgan (1970). La plupart des principes géochimiques décrits dans ce chapitre sont basés sur des concepts d’équilibre. L’exemple décrit dans le paragraphe 7 indique que beaucoup de processus géochimiques dans les aquifères se passent lentement jusqu’à l’équilibre chimique et parfois les équilibres sont atteints. De temps en temps le lecteur peut douter de l’approche à l’équilibre. Les concepts ou modèles à l’équilibre ont cependant une grande importance du fait de leur capacité à établir les conditions aux limites des processus chimiques. Les différences entre les conditions hydro chimiques observées et les conditions à l’équilibre calculées peuvent apporter des connaissances sur le comportement des systèmes ainsi qu’un cadre quantitatif à l’intérieur duquel les questions appropriées peuvent être posées.
3.1 Les eaux souterraines et leurs constituants chimiques
Eaux et électrolytes
L’eau est constituée par l’union de deux atomes d’hydrogène et d’un atome d’hydrogène. L’atome d’oxygène est lié aux atomes d’hydrogène de manière asymétrique, avec un angle de 105 degrés. Cet arrangement asymétrique donne lieu à une charge électrique déséquilibrée qui permet une polarisation caractéristique de la molécule. L’eau à l’état liquide, bien que donnant la formule H2O ou HOH, est composée de groupes moléculaires à l’intérieur desquels les molécules H2O sont retenues grâce aux liaisons hydrogènes. On estime que chaque groupe ou ensemble de molécules dispose d’en moyenne 130 molécules à 0 °C, 90 molécules 20 °C, et 60 molécules à 72 °C (Choppin, 1965). H180O90 est une formule approximative pour l’ensemble a 20 °C.
L’eau est peu commune car la densité de la phase solide, la glace, est substantiellement plus faible que la densité de sa phase liquide. Dans la phase liquide, le maximum de densité est atteint à 4 °C. Avec un refroidissement au-delà de cette température, il y a une diminution significative de la densité.
Tous les éléments ont 2 isotopes ou plus. Dans cet ouvrage cependant, nous ne considèrerons que les isotopes qui fournissent une information géochimique ou hydrologique utile. La formule H2O est une simplification sommaire du point de vue de la structure et elle est aussi une simplification d’un point de vue atomique. L’eau naturelle peut être un mélange des six nucléides listes dans le Tableau 3.1. La nature atomique des isotopes de l’hydrogène sont illustrés dans la Figure 3.1. Dix-huit combinaisons de H-O-H sont possibles en utilisant ces nucleides. 2H216O, 1H218O, 3H217O sont quelques exemples de molécules que comprend l’eau, qui dans sa forme la plus commune est 1H216O. Sur les six isotopes de l’hydrogène et de l’oxygène du Tableau 3.1, cinq sont stables et un, 3H, appelé Tritium, est radioactif, avec une demi-vie de 12,3 ans.
Isotope | Abondance relative (%) |
Type | |
1H | Protium | 99,984 | Stable |
2H | Deutérium | 0,016 | Stable |
3H | Tritium | 0 – 10–15 | Radioactif, Demi-vie 12,3 an |
16O | Oxygène | 99,76 | Stable |
17O | Oxygène | 0,04 | Stable |
18O | Oxygène | 0,20 | Stable |
14C | Carbone | < 0,001 | Radioactif, Demi vie 5730 an |
L’eau pure contient de l’hydrogène et de l’oxygène sous forme ionique autant que sous la forme moléculaire complexée. Les ions sont formés par la dissociation de l’eau,
(3.1)
où les signes plus et moins indiquent la charge des espèces ioniques. L’hydrogène peut se présenter sous des formes très variées tel qu’illustre sur la Figure 3.2. Bien que la forme ionique de l’hydrogène dans l’eau soit généralement exprimée dans les équations tel que H+, il se retrouve normalement sous la forme H3O+, ce qui décrit un noyau hydrogène entouré d’oxygène avec 4 paires de nuages d’électrons. Quand on parle des interactions minérales dans les eaux souterraines, le processus appelé transfert de protons indique un transfert de H+ entre constituants ou phases.
L’eau est un solvant pour beaucoup de sels et quelques types de matière organique. L’eau est efficace dans la dissolution des sels car elle a une constante diélectrique très élevée et également car ses molécules tendent à se combiner avec des ions pour former des ions hydratés. L’agitation thermique des ions dans beaucoup de matériaux est assez grande pour dominer la relative faible force d’attraction qui existe quand ils sont entourés d’eau, ce qui permet à un grand nombre d’ions de se dissoudre dans la solution aqueuse. La stabilité des ions dans la solution aqueuse est favorisée par la formation d’ions hydratés. Chaque ion chargé positivement, appelé cation, attire les extrémités négatives des molécules d’eau polarisées et quelques molécules, dans un arrangement relativement stable. Le nombre de molécules d’eau liées au cation dépend de la taille du cation. Par exemple, le petit cation Be2+ forme l’ion hydraté Be(H2O)42+. Les ions plus grands, tels que Mg2+ ou Al3+, ont des formes hydratées tels que Mg(H2O)62+ et Al(H2O)63+. Les espèces chargées négativement, appelées anions, montrent une plus faible tendance à l’hydratation. Dans ce cas, les anions attirent l’extrémité positive des molécules d’eau polarisées. La taille des ions et leurs formes hydratées sont importantes au regard de la plupart des processus qui ont lieu dans les eaux souterraines.
Comme résultat des interactions biochimiques entre les eaux souterraines et les matériaux géologiques qu’elle traverse, et dans une moindre mesure du fait des contributions de l’atmosphère et des corps de surface, l’eau souterraine contient une large variété d’éléments inorganiques dissous dans des concentrations variées. La concentration totale de ces éléments solides dissous (TDS : Total Dissolved Solid) dans les eaux souterraines est déterminée par le poids des résidus solides obtenus en évaporant jusqu’au séchage d’un volume d’un échantillon d’eau filtrée connu. Les résidus solides consistent presque toujours à des constituants inorganiques et en de très faibles taux de matière organique. Les concentrations en TDS dans les eaux souterraines varient de plusieurs ordres de grandeur. Un schéma très simple mais connu pour caractériser les eaux souterraines, basé sur le TDS est donné dans le Tableau 3.2. Pour mettre les gammes de concentration en perspective, il peut être utile de noter que l’eau qui contient un TDS de plus de 2000–3000 mg/ℓ est généralement trop salée pour être bue. Le TDS de l’eau de mer est environs de 35 000 mg/ℓ.
Catégorie | Solide dissous total (mg/ℓ ou g/m3) |
Eau douce | 0 – 1 000 |
Eau saumâtre | 1 000 – 10 000 |
Eau saline | 10 000 – 100 000 |
Saumure | Plus de 100 000 |
L’eau souterraine peut être vue comme une solution d’électrolytes car presque tous ses éléments majeurs et mineurs dissous sont présents sous forme ionique. Une indication générale des constituants ioniques totaux dissous est donnée en déterminant la capacité de l’eau à conduire un courant électrique induit. Cette propriété est généralement appelée conductivité électrique et est exprimée en termes de conductivité d’un cube d’eau ayant 1 cm de côté. C’est l’inverse de la résistance électrique et son unité est appelée Siemens (S) ou micro Siemens (μS) dans le système SI. Dans le passé, ces unités étaient appelées milli ohms ou microhms. Leur valeur est la même, seules les désignations ont changé. Les gammes de conductivité de l’eau vont de quelques dizaines de micro Siemens pour de l’eau presque pure telle que l’eau de pluie a des centaines de milliers de micoSiemens pour les saumures de bassins sédimentaires profonds.
Une classification des espèces inorganiques que l’on trouve dans les eaux souterraines est présentée dans le Tableau 3.3. Les catégories de concentrations ne sont qu’un guide général. Dans certaines eaux souterraines, les gammes de concentrations sont excédentaires. Les éléments majeurs dans le Tableau 3.3 apparaissent principalement sous la forme ionique et font communément référence aux ions majeurs (Na+, Mg2+, Ca2+, Cl–, , SO42–). La concentration totale de ces six ions majeurs représentent normalement plus de 90 % du total des éléments solides dissous, dépendamment ou indépendamment que l’eau soit diluée ou que sa salinité soit plus grande que l’eau de mer.
Constituants majeurs (supérieur à 5 mg/ℓ) | |
Bicarbonate | Silice |
Calcium | Sodium |
Cérium | Scandium |
Magnésium | Acide carbonique |
Constituants mineurs (0,01 – 10,0 mg/ℓ) | |
Bore | Nitrate |
Carbonate | Potassium |
Fluor | Strontium |
Fer | |
Constituants en traces (moins de 0,1 mg/ℓ) | |
Aluminum | Molybdène |
Antimoine | Nickel |
Arsenic | Niobium |
Baryum | Phosphate |
Béryllium | Platine |
Bismuth | Radium |
Bromate | Rubidium |
Cadmium | Ruthénium |
Cérium | Scandium |
Césium | Sélénium |
Chrome | Argent |
Cobalt | Thallium |
Cuivre | Thorium |
Gallium | Étain |
Germanium | Titane |
Or | Tungstène |
Indium | Uranium |
Iode | Vanadium |
Lantane | Ytterbium |
Plomb | Yttrium |
Lithium | Zinc |
Manganèse | Zircon |
Les concentrations de ces constituants inorganiques majeurs, mineurs et traces dans les eaux souterraines sont contrôlées par la disponibilité de ces éléments dans le sol et le sous-sol à travers lesquels l’eau passe, par les contraintes géochimiques telles que la solubilité et l’adsorption, par les taux (cinétiques) des processus géochimiques, et par la séquence durant lesquelles l’eau a été en contact avec différents minéraux qui sont présentes le long de son parcours. Il est devenu de plus en plus commun que les concentrations des constituants inorganiques dissous soient influencées par les activités anthropiques. Dans quelques cas les contributions des activités anthropiques peuvent entrainer la présence des éléments listés comme éléments mineurs ou trace dans le Tableau 3 et apparaissent comme contaminants aux niveaux de concentrations dont les ordres de grandeur sont au-delà des gammes indiquées dans ce tableau.
Constituants organiques
Les composés organiques sont ceux qui ont du carbone et généralement de l’hydrogène et de l’oxygène comme éléments principaux dans leur cadre structurel. Par définition, le carbone est l’élément clef. Les espèces H2CO3, CO2, , et CO32– qui sont des constituants importants dans les eaux souterraines ne sont cependant pas classés comme composés organiques.
La matière organique dissoute est omniprésente dans les eaux souterraines, bien que sa concentration soit généralement basse au regard des constituants inorganiques. L’on connait peu à propos de la nature des matières organiques dans les eaux souterraines. Les études de sol suggèrent que la majorité de la matière organique dans les flux de sub-surface sont l’acide fulvique et l’acide humique. Ceci fait référence aux types particuliers de matière organique qui persistent dans les eaux de sub-surface car ils sont résistants aux dégradations des micro-organismes. Le poids moléculaire de ces composés organiques sont dans la gamme de quelques milliers à plusieurs milliers de grammes. Le carbone représente environ la moitié de ce poids. Bien que soit peu connu l’origine de la composition de la matière organique dans les eaux souterraines, les analyses des concentrations totales du carbone organique dissout (COD) deviennent une part commune des études des eaux souterraines. Les concentrations entre 0.1-10 mg/ℓ sont les plus communes mais dans certaines zones, les valeurs atteignent des dizaines de milligrammes par litre d’eau.
Gaz dissous
Les gaz les plus abondants dans les eaux souterraines sont N2, O2, CO2, CH4 (méthane), H2S, et N2O. Les trois premiers composent l’atmosphère terrestre et c’est par conséquent sans surprise qu’on les retrouve dans les eaux de sub-surface. CH4, H2S et N2O peuvent souvent exister dans les eaux souterraines à des concentrations significatives car elles sont le produit des processus biogéochimiques dans les zones anaérobies de sub-surface. Comme présenté plus loin dans ce chapitre et dans le chapitre 7, les concentrations de ces gaz peuvent servir d’indicateurs des conditions géochimiques des eaux souterraines.
La concentration des gaz peut avoir une influence significative dans l’environnement hydro-chimique de sub-surface. Ils peuvent limiter l’utilité de l’eau et dans quelques cas peuvent même causer des problèmes majeurs ou même présenter des risques. Par exemple, à cause de son odeur, le H2S à des concentrations supérieures à 1 mg/ℓ devient impropre à la consommation. Le bouillonnement d’une solution de CH4 peut s’accumuler dans des puits ou dans des immeubles et présenter des risques d’explosion. Les gaz sortant de la solution peuvent provoquer des bulles dans les puits ou des obstructions dans les pompes et réduire leur productivité ou leur efficacité. Le Radon 222 (222Rn), qui est un constituent commun des eaux souterraines, parce qu’il est le produit par la désintégration radioactive de l’uranium et du thorium qui sont communs dans le socle et le sol, peut s’accumuler à des concentrations indésirables dans des bâtiments dont le sous-sol n’est pas suffisamment ventilé. Les produits de désintégration du radon 222 peuvent présenter un risque pour la santé humaine.
D’autres espèces de gaz dissous qui se présentent dans les eaux souterraines en petites quantités peuvent fournir des informations sur l’origine de l’eau, leur âge, ou d’autres caractéristiques d’intérêt hydrologique ou géochimique. Il convient de souligner à cet égard Ar, He, Kr, Ne, et Xe, pour lesquels les usages ont été décrits par Surgisaki (1959, 1961) et Mazo (1972).
Unités de concentration
Pour avoir une discussion significative sur les aspects chimiques des eaux souterraines, les montant relatifs de solutés (les constituants organiques ou inorganiques dissous) et de solvant (l’eau) doivent être spécifies. Cela se fait grâce aux unités de concentration. Certains types d’unités de concentration variées sont utilisés :
La molalité est définie comme le nombre de moles de soluté dissous dans une masse de 1 kg de solution. C’est une unité SI avec le symbole mol/kg. Le symbole SI dérivé pour cette quantité, mB où B, indique le soluté. A est normalement utilisé pour désigner le solvant. Une mole du composé équivaut à un poids moléculaire.
La molarité est le nombre de moles en solution dans un m3 de solution. L’unité SI pour la molarité est mol/m3. Il est utile de noter que 1 mol/m3 équivaut à un mmol/ℓ. Les moles par litre, avec le symbole mol/ℓ est une unité acceptée pour la molarité dans le SI et est communément utilisé dans les études des eaux souterraines.
La concentration de masse est la masse de soluté dissoute pour une unité spécifique de volume de solution. L’unité SI pour cette quantité est le kilogramme par mètre cube, avec le symbole kg/m3. Les grammes par litres (g/ℓ) sont une unité SI acceptée. L’unité de concentration la plus commune reportée dans la littérature sur les eaux souterraines est milligrammes par litre (mg/ℓ). Puisque 1 mg/ℓ équivaut à 1 g/m3, il n’y a pas de différence d’ordre de grandeur de cette unité (mg/ℓ) et de l’unité de concentration acceptée dans le SI (g/m3).
Il existe plusieurs autres unités de concentration non SI que l’on retrouve communément dans la littérature sur les eaux souterraines. Équivalents par litre (epℓ) est le nombre de moles de soluté multiplié par la valence des espèces du soluté, dans un litre de solution :
Équivalents par millions (epm) est le nombre de moles du soluté multiplié par la valence des espèces du soluté dans 106 g de solution, ou peut-être décrit comme le nombre d’équivalents milligrammes de soluté par kilogramme de solution :
Les parts par millions (ppm) sont le nombre de grammes de soluté par million de gramme de solution
Pour les eaux douces, 1 ppm est égal à 1 g/m3 ou 1 mg/ℓ. La fraction molaire (XB) est le rapport entre le nombre de moles des espèces d’un soluté donnée au nombre total de moles de tous les composés en solution. Si nB est le nombre de moles de soluté, nA est le nombre de moles du solvant et nC, nD, . . . décrivent le nombre de moles des autres solutés, la fraction molaire du soluté B est
ou XB pour la solution aqueuse peut être représentée par :
Où m indique la molalité.
Dans les protocoles d’analyse chimique, les quantités les plus appropriées sont obtenues par l’utilisation de la verrerie volumétrique. Les concentrations sont par conséquent généralement exprimées dans le laboratoire en termes de masse de soluté pour un volume d’eau donne. La plupart laboratoires d’analyses chimiques reportent les résultats en milligrammes par litres ou en unités SI, tel que kg/m3. Quand les résultats des analyses chimiques sont utilisés dans des contextes de géochimie, il est généralement nécessaire d’utiliser les résultats exprimés en molalité ou en molarité, puisque les éléments se combinent pour former des composés en fonction des relations entre les teneurs plutôt qu’en fonction des masses ou poids. Pour faire la conversion entre molarité et kilogrammes par mètre cube, la relation suivante est utilisée :
Si l’eau n’a pas de grandes concentrations en solides totaux dissous et si la température est proche de 4 °C, 1 ℓ de solution pèse 1 kg, dans quels cas la molalité et la molarité sont équivalentes et 1mg/ℓ = 1 ppm. A des fins pratiques, l’eau ayant mois de 10 000 mg/ℓ de solides totaux dissous, et a des températures environs sous les 100 °C, peut être considérée comme ayant une densité proche de 1kg/ℓ pour utiliser les unités équivalentes susmentionnées. Si l’eau a une salinité ou une température plus grande, une correction des densités devra être utilisée pour convertir les unités ayant des dénominateurs de poids et de volume.
3.2 Equilibres chimiques
La loi d’action de masse
L’une des relations les plus utilisées dans l’analyse de processus chimiques des eaux souterraines est la loi d’action de masse. Il est connu depuis plus d’un siècle que la force motrice d’une réaction chimique est liée aux concentrations des constituants qui réagissent et aux concentrations des produits de la réaction. Considérons les composants B et C réagissant pour former les produits D et E,
(3.2)
où b, c, d, et e sont le nombre de moles des constituants chimiques B, C, D, E, respectivement.
La loi de l’action des masses exprime la relation entre les réactifs et les produits lorsque la réaction est à l’équilibre,
(3.3)
Où K est un coefficient connu comme la constante d’équilibre thermodynamique ou la constante de stabilité. Les parenthèses précisent que la concentration du constituant est la concentration thermodynamiquement efficace, habituellement appelée activité. L’équation (3.3) indique que pour toute condition initiale, la réaction exprimée en Eq. (3.2) se poursuivra jusqu’à ce que les réactifs et les produits atteignent leurs activités à l’équilibre. Selon les activités initiales, la réaction peut se produire vers la gauche ou vers la droite pour atteindre cet état d’équilibre.
La loi de l’action de masse ne contient aucun paramètre qui exprime la vitesse à laquelle la réaction se déroule et ne nous dit rien de la cinétique des processus chimique. Il s’agit strictement d’une situation d’équilibre. Par exemple, considérons la réaction qui se produit lorsque les eaux souterraines traversent un aquifère calcaire composé de calcite minérale (CaCO3). La réaction qui décrit l’équilibre thermodynamique de la calcite est
(3.4)
Cette réaction se déroulera vers la droite (dissolution minérale) ou vers la gauche (précipitation minérale) jusqu’à ce que l’équilibre des masses soit atteint. Cela peut prendre des années ou même des milliers d’années pour que l’équilibre soit atteint. Après une perturbation dans le système, comme l’ajout de réactifs ou l’élimination de produits, le système continuera d’aller vers l’état d’équilibre. Si la température ou la pression change, le système se dirige vers un nouvel équilibre car la grandeur de K change. Si les perturbations sont fréquentes par rapport à la vitesse de la réaction, l’équilibre ne sera jamais atteint. Comme nous le verrons au chapitre 7, certaines interactions chimiques entre les eaux souterraines et ses matériaux en place n’atteignent jamais l’équilibre.
Coefficient d’Activité
Dans la loi d’action de masse, les concentrations des solutés sont exprimées sous forme d’activités. L’activité et la molalité sont liés par :
(3.5)
où ai est l’activité des espèces de soluté i, mi la molalité, et γi le coefficient d’activité. γ porte les dimensions de la molalité réciproque (kg/mol), et ai est donc sans dimension. Sauf pour les eaux avec des concentrations de sel extrêmement élevées, γ est inférieur à 1 pour les espèces ioniques. Dans la section précédente, l’activité était appelée concentration thermodynamiquement efficace, car il est conceptuellement pratique de la considérer comme cette partie de mi qui participe réellement à la réaction. Le coefficient d’activité est donc juste un facteur d’ajustement qui peut être utilisé pour convertir les concentrations sous la forme appropriée pour une utilisation dans la plupart des équations basées sur la thermodynamique.
Le coefficient d’activité d’un soluté donné est le même dans toutes les solutions de force ionique identique. La force ionique I est définie par la relation
(3.6)
où mi est la molalité des espèces i et zi est la valence ou la charge que l’ion porte. Pour les eaux souterraines dans lesquelles les six ions majeurs communs sont les seuls constituants ioniques qui existent en concentration significative,
(3.7)
Où les quantités entre parenthèses sont des molalités. Pour obtenir des valeurs de γi, les relations graphiques de γ par rapport à I montrées à la Figure 3.3 peuvent être utilisées pour le commun des constituants inorganiques ou à des concentrations diluées, une relation connue sous le nom de l’équation de Debye-Huckel peut être utilisée (Annexe IV). Pour des forces ioniques inférieures à 0,1, les coefficients d’activité de la plupart des ions minoritaires communs peuvent être estimés à partir de la table de Kielland, qui figure également à l’annexe IV. Pour une discussion sur la base théorique pour les relations de coefficient d’activité, le lecteur est référé à Babcock (1963). La comparaison entre les valeurs expérimentales et calculées des coefficients d’activité est faite par Guenther (1968).
Equilibre et Energie Libre
D’un point de vue thermodynamique, l’état d’équilibre est un état maximal de stabilité au sein d’un système physicochimique fermé qui se déroule grâce à des processus irréversibles (Stumm et Morgan, 1970). Les concepts de stabilité et d’instabilité pour un système mécanique simple servent d’étapes illustratives pour développer le concept thermodynamique d’équilibre. Des exemples similaires ont été utilisés par Guggenheim (1949) et al. Considérons trois positions différentes d’équilibre d’une boîte rectangulaire à surface horizontale [Figure 3.4 (a)]. La position 3 est la position stable la plus que la boîte peut atteindre. Dans cette position, L’énergie du potentiel gravitationnel est au minimum, et si la position est légèrement perturbée, elle va retourner dans les conditions quilibre stable.
En position I, la boîte est également en position équilibre, position à laquelle elle reviendra si elle est légèrement perturbée. Mais dans cette position, l’énergie potentielle n’est pas minimale, donc il s’agit d’une condition d’équilibre métastable. Si la boîte en position 2 est perturbée seulement légèrement, la boîte se déplacera vers une nouvelle position. La position 2 est donc une condition d’équilibre instable.
Une analogie entre le système mécanique et le système thermodynamique est illustrée à la Figure 3.4 (b). Suivant le développement de Stumm et Morgan (1970), un profil hypothétique, d’énergie généralisée ou d’entropie est représenté comme une fonction de l’état du système. Les conditions d’équilibre stable, métastable et instable sont représentées par des creux et des pics sur la fonction énergie ou entropie. Si le système chimique existe dans des conditions fermées à température et à pression constante, sa réponse au changement peut être décrite en termes d’énergie particulière, fonction connue sous le nom d’énergie libre de Gibbs, nommée d’après Willard Gibbs, le fondateur de la thermodynamique classique. Cette orientation vers un changement possible en réponse à une modification donnée d’une composition variable est accompagnée d’une diminution d’énergie libre de Gibbs. L’état C est l’état le plus stable car il a une énergie libre de Gibbs absolue minimale dans les conditions d’un système fermé à température et pression constantes. L’état A est stable au regard des états infinitésimaux proches du système, mais est instable par rapport à un changement fini vers l’état C. Les procédés naturels procèdent vers les états d’équilibre et ne s’éloignent jamais d’eux. Par conséquent, l’équilibre thermodynamique se retrouve dans des conditions d’équilibre métastables et stables, mais pas dans les conditions d’équilibre instable.
La force motrice dans une réaction chimique est généralement représentée par la réaction d’Energie libre de Gibbs appelée ΔGr. Pour les systèmes à température et à pression constante, ΔGr. représente la variation d’énergie interne par unité de masse et est une mesure de la capacité de la réaction à effectuer des travaux non mécaniques. Puisque dans ce texte notre objectif dans l’utilisation des données thermodynamiques se concentre sur la détermination des directions dans lesquelles les réactions se déroulent et sur l’obtention de valeurs numériques pour les constantes d’équilibre, il est peu nécessaire de considérer directement les composés thermodynamiques qui aboutissent à ΔGr. Pour le développement de la théorie de la chimie thermodynamique, le lecteur est référé au texte de Denbigh (1966), et la discussion complète sur la thermodynamique des systèmes de sol par Babcock (1963).
La condition de l’équilibre chimique peut être définie par
∑ énergie-libre : produits – ∑ énergie-libre : réactifs = 0 (3.8)
L’étape suivante de ce développement est de relier les changements d’énergie libre dans les réactions à leurs constantes d’équilibre. Pour ce faire, un système pratique de comptabilité d’Energie libre est nécessaire. La formation de l’Energie libre Standard, , est définie comme l’Energie libre de la réaction pour produire 1 mole d’une substance à partir des éléments stables dans des conditions spécifiées comme conditions d’état standard. L’énergie libre standard des éléments dans leur état chimique pur le plus stable a une valeur égale à zéro par convention. De même, il est commode de prendre comme zéro le de l’ion hydrogène. Par exemple, le carbone à l’état graphite et l’oxygène sous forme O2 ont leurs à zéro, tandis que 1 mole de dioxyde de carbone gazeux a une valeur de de -386,41 kJ (-92,31 kcal), qui est l’énergie libérée lorsque le CO2 se forme à partir des éléments stables dans leur état standard. L’état standard de l’eau pure est défini comme unité de température et de pression de la réaction, et pour les solutés, l’état standard est une concentration unimolaire dans des conditions hypothétiques où le coefficient d’activité est l’unité ou en d’autres termes, dans les conditions où l’activité est égale à la molalité. Pour les gaz, l’état standard est un gaz pur (idéal) à 1 bar de pression total à la température de la réaction. Le système des états standards arbitrairement défini peut sembler inutilement complexe, mais en pratique, il mène à un système d’évaluation ordonné. Une discussion plus détaillée des états standards est fournie par Berner (1971).
L’énergie standard libre de changement de réaction, , est la somme des énergies libre de formation des produits dans leurs états standards moins les énergies libres de formation des réactifs dans leurs états standards :
(3.9)
Pour la réaction générale dans l’Équation (3.2), la variation de l’énergie libre de la réaction est liée à l’énergie standard libre du changement et aux activités de chacun des réactifs et des produits, mesurés à la même température, par l’expression :
(3.10)
où R est la constante de gaz universelle et T la température en degrés Kelvin. A 25 °C, R = 8,314 J / K • mol ou 0,001987 kcal / K • mol. La conversion des températures sur l’échelle Celsius à ceux de l’échelle de Kelvin se fait à travers la relation K = °C + 273,15. Pour qu’une réaction chimique se déroule spontanément comme écrit, ΔGr doit être inférieur à zéro ou en d’autres termes, il doit y avoir une diminution nette de l’énergie libre. Si ΔGr > 0, la réaction ne peut se faire que de la droite vers la gauche. Si ΔGr = 0, la réaction ne se déroulera dans aucune direction, auquel cas l’état d’équilibre a été atteint. Conformément à notre définition de la norme pour l’état des solutés (conditions unimolaires où γ = 1), = ΔGr est l’état standard car [D]d[E]e/[B]b[C]c = 1, et donc le logarithme naturel de ce terme est zéro. La substitution de la constante d’équilibre de la relation [Eq. (3.3)] dans l’Équation (3.10) dans les conditions d’équilibre donne :
(3.11)
Pour les conditions d’état standard, la constante d’équilibre peut être obtenue à partir des données d’énergie libre au moyen des relations :
(3.12)
où peut être obtenu à partir de l’Équation (3.9) en utilisant les données . Pour à 25 °C et 1 bar les valeurs ont été calculés pour des milliers d’espèces de minéraux, de gaz et d’eau qui se retrouvent dans les systèmes géologiques (Rossini et al., 1952; Sillen et Martell, 1964, 1971). Des tables moins complètes qui conviennent à l’utilisation des élèves sont inclus dans les textes de Garrels et Christ (1965), Krauskopf (1967) et Berner (1971).
Par rapport à l’abondance des données de pour les conditions de 25 °C et 1 bar de pression totale, il existe une pénurie de données pour d’autres températures et pressions. La pression n’a qu’un léger effet sur les valeurs et a donc peu d’influence sur la constante d’équilibre. À des fins pratiques, la variation de K, pour des pressions de fluides normalement rencontrées à quelques centaines de mètres de la croûte terrestre, est négligeable. Cependant, Le changement de plusieurs degrés peut entraîner des variations significatives sur la constante d’équilibre. Pour obtenir des estimations de la valeur de K à d’autres températures, une expression connue sous le nom de relation de Van’t Hoff, nommée d’après un physico-chimiste néerlandais qui a apporté d’importantes contributions à la fin des années 1800 et au début des années 1900 à la compréhension du comportement de la solution, peut être utilisée :
(3.13)
où T* est la température de référence habituellement 298.15 K (25 °C), T la température de la solution, et l’enthalpie. Les données sur l’enthalpie pour plusieurs minéraux, gaz et espèces dissouts sont présentées dans les tableaux mentionnés ci-dessus. Puisque l’équation de Van’t Hoff ne considère que deux températures et suppose une relation linéaire entre eux, il ne produit que des valeurs approximatives. La meilleure approche est de développer des relations d’interpolation spécifiques à partir de données d’énergie libre sur une large gamme de températures, si de telles données sont disponibles.
Pour illustrer l’utilisation des données de pour obtenir des constantes d’équilibre, considérons la réaction de dissolution de la calcite exprimée dans l’Équation (3.4). Les Valeurs de pour le aCO3, le Ca2+ et le CO32– pures sont -1 129,10, 553,04 et -528,10 kJ, respectivement, à 25 °C et 1 bar. L’énergie libre standard de la réaction est donc :
De l’Équation (3.12) on obtient, pour 25 °C et 1 bar :
Gaz dissous
Lorsque l’eau est exposée à une phase gazeuse, un équilibre est établi entre le gaz et le liquide par un échange de molécules à travers l’interface liquide-gaz. Si la phase gazeuse est un mélange de plus d’un gaz, un équilibre sera établi pour chaque gaz. La pression exercée par chaque gaz dans le mélange est sa pression partielle, qui est définie comme la pression que le composant spécifique du gaz exercerait s’il occupait le même volume seul. La loi de Dalton sur les pressions particulières stipule que dans un mélange de gaz, la pression totale est égale à la somme des pressions partielles. La pression partielle d’une vapeur est également appelée pression de vapeur.
Les eaux souterraines contiennent des gaz dissous en raison de (1) l’exposition à l’atmosphère terrestre avant l’infiltration dans l’environnement souterrain, (2) le contact avec les gaz du sol pendant l’infiltration par la zone non saturée, ou (3) la production de gaz sous la nappe phréatique par des réactions chimiques ou biochimiques impliquant les eaux souterraines, les minéraux, la matière organique et l’activité bactérienne.
Probablement, le plus important des gaz dissous dans les eaux souterraines est le CO2. Deux réactions décrivant l’interaction entre le CO2 gazeux et la dissolution des espèces sont :
(3.14)
(3.15)
où les suffixes (g) et (aq) désignent respectivement des espèces gazeuses et dissoutes. Le rapport CO2 (aq) / H2CO3 est beaucoup plus grand que l’unité dans les solutions aqueuses; Cependant, il est habituel de désigner tous les CO2 dissous dans l’eau comme H2CO3 (acide carbonique). Cette utilisation n’entraîne pas de perte par généralisation tant que la cohérence est maintenue ailleurs que dans le traitement de cette espèce moléculaire dissoute. Ces questions sont discutées en détail par Kern (1960).
La pression partielle d’un gaz dissous est la pression partielle avec laquelle le gaz dissous serait en équilibre si la solution était en contact avec une phase gazeuse. Il est courant de se référer à la pression partielle d’un soluté tel que H2CO3 ou substance dissoute tel que O2 même si l’eau : peut être isolée de la phase gazeuse. Par exemple, on peut se référer à la pression partielle du CO2 dissous dans les eaux souterraines même si l’eau est isolée de l’atmosphère terrestre et des gaz dans les espaces ouverts au-dessus de la nappe phréatique.
Dans les solutions diluées, la pression partielle d’un soluté, exprimée en barres (1 bar = 105 N / m2), est proportionnel à sa molalité. C’est une déclaration de la loi de Henry. Ceci est applicable aux gaz qui ne sont pas très solubles, tels que CO2, O2, N2, CH4, et H2S. A partir de l’application de la loi d’action de masse dont l’équation est,
(3.16)
Parce que l’activité de H2O est l’unité, à l’exception des solutions très salines et parce que la pression partielle de CO2 en barre est égale à sa molalité, l’Équation (3.16) peut être exprimée par :
(3.17)
γCO2 est le coefficient d’activité pour CO2 dissous et PCO2 est la pression partielle en barres. Avec cette expression, la pression partielle du CO2 pourrait exister à l’équilibre avec une solution dont l’activité de H2CO3 spécifique peut être calculée. Les coefficients d’activité pour les espèces de soluté non chargées telles que les gaz dissous (CO2, O2, H2S, N2, etc.) sont supérieurs à l’unité. La solubilité de ces gaz dans l’eau diminue donc avec l’augmentation de la force ionique. Cet effet est connu sous le nom d’effet de salage.
En plus de sa dépendance à la force ionique, le coefficient d’activité peut être influencé par le type d’électrolyte présent dans l’eau. Par exemple, à une force ionique donnée, CO2 est moins soluble (c.-à-d., a un coefficient d’activité plus important) dans une solution de NaCl que dans une solution KCl. La plupart des problèmes géochimiques ayant un intérêt en hydrologie des eaux souterraines impliquent des solutions aux forces ioniques inférieures à 0,1 ou 0,2. C’est une pratique courante, par conséquent, que le coefficient d’activité du gaz dissous soit approximé comme l’unité. Par conséquent, dans ces conditions, l’Équation (3.17) se réduit à la relation :
3.3 Association et dissociation des espèces dissoutes
Condition d’Électro-Neutralité
Avant de discuter des processus et des conséquences de l’interaction chimique entre les eaux souterraines et les matériaux géologiques à travers lesquels celles-ci s’écoulent, le comportement des constituants dissous en phase liquide dans les interactions avec les phases solides seront prises en considération.
Une condition fondamentale des solutions d’électrolyte est qu’à l’échelle macroscopique, plutôt qu’à l’échelle moléculaire, il existe une condition d’électro-neutralité. La somme des charges ioniques positives est égale à la somme des charges ioniques négatives,
(3.19)
Où Zest la valence ionique, mc la molalité des cations et ma la molalité des anions. Ceci est connu comme l’équation de l’électro-neutralité, ou l’équation bilan de charge, et elle est utilisée dans presque tous les calculs impliquant l’équilibre dans les interactions entre l’eau et les matériaux géologiques. Une indication sur l’exactitude des données d’analyse de l’eau peut être obtenue en utilisant l’équation du bilan de charge. Par exemple, si un échantillon d’eau est analysé pour rechercher les principaux constituants énumérés au tableau 3.3, et si les valeurs de concentration sont substituées à l’Équation (3.19) comme :
(3.20)
Les quantités obtenues sur les côtés gauche et droit de l’équation devraient être approximativement égales. Le silicium n’est pas inclus dans cette relation car il apparait davantage sous une forme neutre plutôt que chargée. Si un écart important par rapport à l’égalité apparait, il doit y avoir (1) des erreurs d’analyse dans les déterminations des concentrations ou (2) des espèces ioniques à des niveaux de concentration significatives qui n’ont pas été inclus dans l’analyse. Une pratique courante permet d’exprimer l’écart par rapport à l’égalité sous la forme :
(3.21)
où est l’erreur d’équilibre de charge exprimée en pourcentage et les autres termes sont définis ci-dessus.
Les laboratoires d’analyse d’eau considèrent normalement qu’une erreur d’équilibre de charge de moins de 5 % environ est acceptable, bien que pour certains types d’eaux souterraines beaucoup de laboratoires obtiennent constamment des résultats avec des erreurs beaucoup plus faibles que cela. Il faut garder à l’esprit qu’une erreur d’équilibre de charge acceptable peut se produire dans le cas où de grandes erreurs dans les analyses individuelles des ions se produisent mutuellement. L’évaluation de l’erreur de l’équilibre de charge ne peut donc pas être utilisée comme le seul moyen de détection d’erreurs analytiques.
Pour le calcul de l’erreur d’équilibre de charge, les résultats des analyses chimiques sont parfois exprimés en milliéquivalents par litre. Lorsque ces unités sont utilisées, les termes de valence sont supprimés de l’Équation (3.20).
Dissociation et Activité de l’Eau
À l’état liquide, l’eau subit la dissociation à l’équilibre,
(3.22)
Qui, peut s’exprimer à partir de la loi d’action de masse comme
(3.23)
Où les parenthèses désignent les activités. On rappellera que l’activité de l’eau pure est définie comme l’unité dans des conditions d’état standard. La condition de référence de 25 °C à 1 bar de pression sera utilisée. Étant donné que la vapeur d’eau à des pressions faibles ou modérées se comporte comme un gaz idéal, L’activité de l’eau en solution aqueuse peut s’exprimer comme :
(3.24)
où est la pression partielle de la vapeur pour l’eau pure et PH2O est la pression partielle de la vapeur pour la solution aqueuse à 25°C et 1 bar, l’activité de l’eau dans une solution de NaCl a une concentration similaire à celle de l’eau de mer, qui est environ de 3 % soit 0,98, et dans une solution de NaCl à 20 %, soit 0,84. Ainsi, à l’exception d’eaux fortement concentrées telles qu’une saumure, l’activité de l’eau peut, pour des fins pratiques, être prise comme unité. Dans ce cas :
(3.25)
Les valeurs de Kw à des températures comprises entre 0 et 50 °C sont indiquées au tableau 3.4. Parce que l’effet de la pression du fluide est très faible, cette expression est également acceptable pour des pressions élevées telles que 100 bars. A 1 000 bars et 25 °C, l’activité de l’eau est 2,062 (Garrels et Christ, 1965).
t (°C) | Kw × 10–14 |
0 | 0,1139 |
5 | 0,1846 |
10 | 0,2920 |
15 | 0,4505 |
20 | 0,6809 |
25 | 1,008 |
30 | 1,469 |
35 | 2,089 |
40 | 2,919 |
45 | 4,018 |
50 | 5,474 |
55 | 7,297 |
60 | 9,614 |
Le pH est défini comme le logarithme négatif de l’activité de l’ion hydrogène, l’eau à 25 °C et à pH 7 a des activités de H+ et OH– équivalentes ([H+] = [OH–] = 1.00 × 10–7). À de faible températures, l’égalité des activités de H+ et OH– se produit pour des valeurs de pH élevées et vice versa pour les températures élevées. Par exemple, à 0 °C l’égalité se produit à pH 7,53 et à 50 °C à pH 6,63.
Acides Polyprotiques
L’acide le plus important dans les eaux souterraines naturelles et les eaux souterraines contaminées est l’acide carbonique (H2CO3), qui se forme lorsque le dioxyde de carbone (CO2) se combine avec l’eau [Eq. (3.15)]. L’acide carbonique peut se dissocier en plus d’une étape en transférant des ions hydrogène (protons) à travers les réactions :
(3.26)
(3.27)
Parce que les ions hydrogènes sont communément appelés protons par les chimistes et parce que plus d’une dissociation d’ion hydrogène est impliquée, l’acide carbonique est connu sous le nom d’acide polyprotique. Un autre acide polyprotique qui se retrouve dans les eaux souterraines est l’acide phosphorique, bien que celui-ci soit dans des concentrations beaucoup plus petites que l’acide carbonique. Ce dernier se dissocie en trois étapes :
(3.28)
(3.29)
(3.30)
Puisque les équations de dissociation pour les acides polyprotiques impliquent tous H+, il est possible de calculer la fraction de l’acide sous sa forme moléculaire ou dans l’une de ses formes anioniques en fonction du pH. Par exemple, pour l’acide carbonique, les constantes de dissociation pour les Équations (3.26) et (3.27) peuvent être exprimées selon la loi d’action de masse comme :
(3.31)
(3.32)
On peut exprimer l’équilibre de masse pour le carbone dans l’acide et ses espèces anioniques dissociés, exprimée en molalité est :
(3.33)
Ici le DIC (Dissolved Inorganic Carbon) est la concentration de carbone total inorganique dissous dans ces espèces. Si nous sélectionnons une valeur arbitraire de 1 pour DIC et réexprimons Eq. (3.33) en termes de pH, , KH2CO3 et , puis en termes de pH, CO32– et les constantes de dissociation, les équations pour la concentration relative de H2CO3, , CO32– en fonction du pH sont obtenues. Elles sont exprimées graphiquement sur la Figure 3.5 (a).
À de faible pH, H2CO3 est l’espèce dominante et à pH élevé, le CO32– est dominant. Sur la majeure partie de la gamme de pH normal des eaux souterraines (6-9), est l’espèce de carbone dominante. C’est pourquoi , plutôt que CO32–ou H2CO3, est énuméré dans le Tableau 3.3 comme l’un des principaux constituants inorganiques dissous dans les eaux souterraines. À la suite d’une analyse similaire, les concentrations relatives des espèces de phosphates dissous sont représentées sur la Figure 3.5 (b). Dans le classement normal du pH des eaux souterraines le et le HPO42– sont les espèces dominantes.
Complexes Ioniques
Les analyses chimiques des constituants dissous dans les eaux souterraines indiquent les concentrations totales des constituants, mais pas la forme dans laquelle les constituants se comportent dans l’eau. Certains constituants sont presque tous présents sous forme ionique simple. Par exemple, le chlore est présent sous forme d’ion chlorure, Cl–. Le calcium et le magnésium, cependant, sont présents sous forme d’ions libre, Ca2+ et Mg2+, dans des associations d’ions inorganiques telles que les espèces non chargées (zéro-valence), , , , et , et les associations chargées, et . Ces espèces chargés et non chargées sont appelées complexes ou, dans certains cas, sont considérées comme des paires d’ions. Les complexes se forment à cause des forces d’attraction électrique entre les ions de charge opposée. Certaines espèces inorganiques telles que l’aluminium se retrouvent dans les solutions dissoutes sous la forme Al3+, en tant que complexe à charge positive ou paire d’ions, [Al(OH)]2+, et comme complexes avec des liaisons covalentes telles que [[Al2(OH)2]4+, [Al6(OH15)]3+, et [Al(OH)4]–. La concentration dissoute totale d’une espèce inorganique Ci peut être exprimée comme :
(3.34)
L’apparition de complexes ioniques peut être traitée en utilisant la loi d’action de masse. Par exemple, la formation de peut être exprimée comme
(3.35)
Avec pour équation d’équilibre :
(3.36)
où est la constante d’équilibre thermodynamique, parfois appelée constante de dissociation, et les termes entre parenthèses sont des activités. Les concentrations des ions libres sont liées aux activités par la force ionique suivant la relation de coefficient d’activité décrites à la Section 3.2. Le coefficient d’activité pour un complexe neutre, , est pris comme unité. Les valeurs pour et les constantes d’équilibre pour d’autres paires et complexes inorganiques peuvent être calculées en utilisant l’Équation (3.12).
Le tableau 3.5 montre les résultats d’une analyse chimique des eaux souterraines exprimée en milligrammes par litre (ou grammes par mètre cube) et par molalité. Les concentrations d’ions libres et de complexes d’ions inorganiques ont été calculées à partir de la concentration analytique total telle que décrite ci-dessous. Dans cet échantillon (tableau 3.5), les seuls complexes qui se présentent dans des concentrations appréciables sont ceux du sulfate ; 18 % du sulfate total est complexé. Lorsque les eaux souterraines ont une grande quantité de sulfate, les concentrations des complexes de sulfate sont naturellement très élevées. La procédure par laquelle les concentrations des complexes d’ions libres ont été calculées est décrite par Garrels et Christ (1965) et Truesdell et Jones (1974) dans le Tableau 3.5.
Résultats analytiques provenant du laboratoire | Computed dissolved species | |||||
Constituants dissous | mg/ℓ ou g/m3 | Molalité × 10–3 | Concentration des ions libres (molalité × 10–3) |
SO42– ion pairs* (molalité × 10–3) |
ion pairs† (molalité × 10–3) |
CO32– ion pairs‡ (molalité × 10–3) |
Ca | 136 | 3,40 | 2,61 | 0,69 | 0,09 | 0,007 |
Mg | 63 | 2,59 | 2,00 | 0,47 | 0,12 | 0,004 |
Na | 325 | 14,13 | 14,0 | 0,07 | 0,06 | 0,001 |
K | 9,0 | 0,23 | 0,23 | 0,003 | <0,0001 | <0,0001 |
Cl | 40 | 1,0 | 1,0 | |||
SO4 | 640 | 6,67 | 5,43 | |||
HCO3 | 651 | 10,67 | 10,4 | |||
CO3 | 0,12 | 0,020 | 0,0086 | |||
DIC | 147,5 | 12,29 | CO32–, DIC calculé à partir du HCO3 et les données de pH | |||
Temp. = 10 °C, pH = 7,20, pression partielle CO2 (calculé) = 3,04 × 10–2 bar |
Les constituants inorganiques dans les eaux souterraines peuvent également former des complexes dissous avec des composés organiques tels que les acides fulviques et humiques. Dans les eaux souterraines naturelles, qui dissolvent rarement le carbone organique à des concentrations supérieures à 10 mg/ℓ, la complexation des ions majeurs avec la matière organique dissoute est probablement insignifiante. Dans les eaux souterraines contaminées, cependant, le mouvement des composés inorganiques dangereux en tant que complexes organiques peut être très important.
Calcul des Espèces Dissoutes
Selon les méthodes analytiques utilisées en laboratoire, les résultats de l’analyse du carbone inorganique peuvent être exprimés en carbone inorganique dissous total (DIC) ou comme . Chacun de ces types de données peut être utilisé, en fonction des valeurs du pH pour calculer les concentrations de H2CO3, , CO32– ou DIC, et la pression partielle de CO2. Les équations (3.18), (3.20), (3.31), (3.32), et (3.33) servent de base pour les calculs. Si l’eau est non-salée, l’activité de H2O et les coefficients d’activité du CO2 et H2CO3 sont pris comme unité. Il faut garder à l’esprit que les Eq. (3.18), (3.31), et (3.32) sont exprimés en activités, alors que les Équations (3.20) et (3.33) nécessitent les molalités. Si, dans l’analyse chimique d’une eau de la concentration et le pH sont déterminés, l’Éq. (3.31) peut être utilisée, avec l’Équation (3.5) pour la conversion entre les concentrations et les activités, pour obtenir l’activité et la concentration du H2CO3. La substitution de l’activité de H2CO3 dans l’Équation (3.8) donne la pression partielle du CO2 en bar. L’activité du CO32– peut être calculée à partir d’Eq. (3.32), puis convertis en concentration par l’Équation (3.5). La substitution des valeurs de concentration dans l’Équation (3.33) donne la concentration du DIC. La précision du résultat calculé dépend fortement de la précision du pH mesuré. Pour obtenir des données de pH fiables, il faut effectuer les mesures du pH sur le terrain. Ceci est abordé plus loin dans la Section 3.9. Dans l’illustration suivante de la méthode de calcul des concentrations des ions libres et des complexes, on suppose que seuls les complexes sulfates cationiques sont présents en concentrations importantes. Par conséquent les relations d’équilibre sont,
(3.37)
(3.38)
(3.39)
A partir du principe de conservation de masse, on peut écrire
(3.40)
(3.41)
(3.42)
(3.43)
Les concentrations en Ca (total), Mg (total), Na (total) et SO4 (total) sont celles obtenu à partir de l’analyse en laboratoire. Nous avons donc sept équations et sept inconnus (Na+, Mg2+, Ca2+, SO42–, , , et ). Les équations peuvent être résolues manuellement en utilisant la méthode des approximations successives décrite par Garrels et Christ (1965). La conversion entre les activités et les molalités s’effectue en utilisant la force ionique par rapport aux relations indiquées par les coefficient d’activité dans les discussions sur les Équations (3.5) et (3.6). Dans de nombreux cas, la force ionique est calculée lorsque les valeurs de concentration totale ont une précision acceptable. Cependant, dans une solution saline, la force ionique devrait être ajustée pour l’effet des complexes.
Le processus de calcul des concentrations des ions libres et des complexes peut être assez ennuyeux et fastidieux, en particulier lorsque le sulfate, le bicarbonate, et les complexes de carbonate sont tous inclus dans les calculs. Ces dernières années, il est devenu commun que les calculs soient effectués par un ordinateur numérique. Il y a plusieurs programmes informatiques bien documentés et largement utilisés et disponibles pour ces objectifs. Deux des programmes les plus facilement disponibles sont ceux de Truesdell et Jones (1974), qui ont été utilisés pour obtenir les résultats énumérés dans le Tableau 3.5, et Kharaka et Barnes (1973). Le traitement des données chimiques sur les eaux souterraines qui utilisent des programmes de ce type devient une procédure relativement standard dans les situations où l’on souhaite interpréter les analyses chimiques dans un cadre géochimique.
3.4 Effet des gradients de concentration
La diffusion dans les solutions est le processus par lequel les constituants ioniques ou moléculaires se déplacent sous l’influence de leur activité cinétique en direction de leur gradient de concentration. La diffusion se produit en l’absence de tout mouvement hydraulique en désordre dans la solution. Si la solution coule, la diffusion est mécanique, ainsi que les mécanismes de dispersion qui provoque le mélange de constituants ioniques ou moléculaires. La diffusion ne cesse que lorsque les gradients de concentration deviennent inexistants. Le processus de diffusion est souvent appelée autodiffusion, diffusion moléculaire ou diffusion ionique.
La masse de substance diffusante passant par une section transversale donnée par unité de temps est proportionnelle au gradient de concentration. C’est ce qu’on appelle la première loi de Fick. Cela peut être exprimé comme suit :
(3.44)
où F, qui est le flux de masse, est la masse de soluté par unité de surface par unité de temps [M/L2T]; D représente le coefficient de diffusion [L2/T] ; C est la concentration de soluté [M/L3] ; et dC/dx est le gradient de concentration, qui est une quantité négative dans la direction de la diffusion. Les coefficients de diffusion pour les électrolytes en solution aqueuse sont bien connus. Les ions majeurs dans les eaux souterraines (Na+, K+, Mg2+, Ca2+, Cl–, , SO42–) ont des coefficients de diffusion compris entre 1 × 10–9 à 2 × 10–9 m2/s à 25 °C (Robinson et Stokes, 1965). Les coefficients dépendent de la température. À 5 °C, par exemple, les coefficients sont environ 50 % plus petits. L’effet ionique de la force est très faible.
Dans les milieux poreux, les coefficients de diffusion apparents pour ces ions sont beaucoup plus petits que dans l’eau parce que les ions suivent des chemins de diffusion plus longs causés par la présence des particules dans la matrice solide et à cause de l’adsorption sur les solides. Le coefficient de diffusion apparent pour les espèces non adsorbées dans les milieux poreux, D*, est représenté par la relation
D* = ωD (3.45)
où ω, qui est inférieur à 1, est un coefficient empirique qui prend en compte l’effet de la phase solide du milieu poreux sur la diffusion. En laboratoire, les études de diffusion d’ions non adsorbés dans des matériaux géologiques poreux, les valeurs de ω entre 0,5 et 0,01 sont communément observés.
De la première loi de Fick et l’équation de continuité, il est possible de dériver une équation différentielle qui rapporte la concentration d’une substance diffusante à l’espace et le temps. Dans une dimension, cette expression, connue sous le nom de deuxième loi de Fick, est
(3.46)
Pour obtenir une indication sur les taux auxquels les solutés peuvent se diffuser au sein des matériaux géologiques poreux, nous considérerons une situation hypothétique où deux strates contenant différentes concentrations de soluté sont en contact. On suppose que les strates sont saturées d’eau et que les gradients hydrauliques dans ces strates sont négligeables. À un moment initial, une des strates a des espèces de soluté i à la concentration C0. Dans l’autre cas, la concentration initiale de C est assez petite pour être approximativement zéro. En raison du gradient de concentration à travers l’interface, le soluté diffuse de la couche de concentration supérieure à la couche de concentration inférieure. On supposera également que la concentration de soluté dans la couche de concentration supérieure reste constante avec le temps, comme ce serait le cas si la concentration du soluté avait été maintenue à l’équilibre par dissolution minérale. La valeur de C dans la direction x dans le temps t peut être calculé à partir de la relation (Crank, 1956)
(3.47)
Où erfc est la fonction d’erreur complémentaire (Annexe V). En supposant que D* à une valeur de 5 × 10–10 m2/s, le profil de concentration de soluté à des intervalles de temps spécifiés peut être calculé. Par exemple, si on choisit une concentration relative C/C0 de 0,1 et une distance x de 10 m, l’Équation (3.47) indique que le temps de diffusion serait environ de 500 ans. Il est donc évident que la diffusion est un processus relativement lent. Dans les zones de flux d’eaux souterraines actifs, ses effets sont généralement masqués par les effets du mouvement de masse de l’eau. Dans les dépôts à faible perméabilité comme les argiles ou les schistes, au sein desquels les vitesses des eaux souterraines sont petites, la diffusion sur des périodes de temps géologiques peut cependant avoir une forte influence sur la répartition spatiale des constituants dissous. Ceci est abordé plus en détail dans les Sections 7.8 et 9.2.
Les études de laboratoire ont montré que les argiles compactées peuvent agir comme membranes semi-perméables (Hanshaw, 1962). Les membranes semi-perméables limitent le passage des ions tout en permettant un passage relativement illimité des espèces neutres. Si les eaux interstitielles dans les strates de chaque côté d’une couche d’argile compacte ont différentes concentrations ioniques, la concentration de l’eau dans ces strates doit également être différente. Parce que les molécules d’eau, comme espèces non chargées, peuvent se déplacer à travers des membranes semi-perméables en argile, il s’ensuit que dans des conditions ou les gradients hydrauliques sont négligeable à travers la membrane, le mouvement de la concentration en eau la plus élevée (zone de faible salinité) vers la zone de faible concentration en eau (zone de forte salinité) va se produire par diffusion. Si la zone de salinité supérieure est un système fermé, le mouvement de l’eau dans la zone par diffusion à travers l’argile entrainera une augmentation de la pression du fluide. Si la zone de salinité inférieure est un système fermé, la pression du fluide diminuera. Ce processus de développement d’un différentiel de pression à travers l’argile est connu sous le nom d’osmose. La pression osmotique à l’équilibre dans l’argile est la différence de pression qui existe si l’effet de la diffusion de l’eau est équilibré par la différence de pression. Lorsque cela se produit, La migration de l’eau à travers l’argile cesse. Dans les expériences de laboratoire, la pression osmotique à travers une membrane semi-perméable séparant des solutions de différentes concentrations est mesurée en appliquant une pression différentielle juste suffisante pour empêcher la diffusion de l’eau. Dans les bassins sédimentaires l’osmose peut provoquer des écarts de pression significatifs sur les strates argileuses, même si l’équilibre osmotique n’est pas atteinte.
Plusieurs équations ont été utilisées pour exprimer la relation entre l’osmose de pression différentielle et la différence de concentration de la solution sur une membrane semi-perméable. Une d’elles, qui peut être dérivée des arguments thermodynamiques (Babcock, 1963), est
(3.48)
où P0 est le différentiel de pression hydrostatique causé par l’osmose, R est la constante des gaz (0.0821 litres • bar / K • mol), T en degrés Kelvin, est le volume molaire d’eau pure (0,018 ℓ/mol à 25 °C) et [H2O]I et [H2O]II sont les activités de l’eau dans la solution la plus salée et la solution la moins salée, respectivement. Les valeurs de l’activité de l’eau dans diverses solutions salines sont énumérées par Robinson et Stokes(1965) en utilisant l’Équation (3.48), on peut montrer que les différences de salinité qui ne sont pas rares dans les eaux souterraines des bassins sédimentaires peuvent causer de fortes pressions osmotiques, à condition bien sûr qu’il y ait une argile ou un schiste compact ou non qui séparent les zones de salinité. Par exemple, on considère deux aquifères de grès, I et II, séparés par une couche d’argile compacte. Si l’eau dans les deux aquifères présente des concentrations élevées de NaCl, une avec NaCl à 6 % et l’autre avec NaCl à 12 %, le rapport d’activité H2O sera de 0,95 qui, lors de la substitution dans l’Équation (3.48) produit une différence de pression osmotique entre les deux aquifères de 68 bars. C’est l’équivalent de 694 m de hauteur hydrostatique (exprimée en eau pure). Cela peut être un différentiel de hauteur frappant dans n’importe quel bassin sédimentaire. Pour de grandes différences de pression osmotiques qui se produisent réellement, il est cependant nécessaire pour les conditions hydro-stratigraphiques de se rassurer que les conditions soient telles que la pression osmotique se développe beaucoup plus rapidement que la pression qui est dissipée par le flux de fluide dans la zone de haute pression et par l’écoulement dans la zone de basse pression.
3.5 Dissolution minérale et solubilité
La solubilité et la constante d’équilibre
Lorsque l’eau entre en contact avec des minéraux, la dissolution des minéraux commence et se poursuit jusqu’à ce que les concentrations d’équilibre soient atteintes dans l’eau ou jusqu’à ce que tous les minéraux aient été consommés. La solubilité d’un minéral est définie comme la masse de minéral qui se dissous par unité de volume de solution dans des conditions données. Les solubilités des minéraux rencontrées dans les eaux souterraines le long de ses chemins d’écoulement varient de plusieurs ordres de grandeur. Ainsi, en fonction des minéraux avec lesquels l’eau a été en contact durant l’histoire de son écoulement, les eaux souterraines peuvent être légèrement plus efficaces à dissoudre les solides dissous les eaux pluviales, ou peuvent devenir beaucoup plus salés que l’eau de mer.
Le tableau 3.6 indique les solubilités de plusieurs minéraux sédimentaires dans de l’eau pure à 25 °C et 1 bar de pression totale. Ce tableau répertorie également les réactions de dissolution pour ces minéraux et les constantes d’équilibre pour les réactions à 25 °C et 1 bar. La solubilité des minéraux carbonatés dépend de la pression partielle de CO2. Les solubilités de la calcite et de la dolomite à deux pressions partielles (10–3 bar et 10–1 bar) sont listés dans le Tableau 3.6 comme indication des gammes de valeurs qui sont pertinentes pour les eaux souterraines naturelles.
Minérale | Réaction de dissociation | Equlibre constant, Keq |
Solubilité à pH 7 (mg/ℓ ou g/m3) |
Gibbsite | Al2O3 • 2H2O + H2O = 2Al3+ + 6OH– | 10–34 | 0,001 |
Quartz | SiO2 + 2H2O = Si(OH)4 | 10–3,7 | 12 |
Apatite hydroxylée | Ca5OH(PO4)3 = 5Ca2+ + 3PO43– +OH– | 10–55,6 | 30 |
Silice amorphe | SiO2 + 2H2O = Si(OH)4 | 10–2,7 | 120 |
Fluorite | CaF2 = Ca2+ + 2F– | 10–9,8 | 160 |
Dolomite | CaMg(CO3)2 = Ca2+ + Mg2+ + 2CO32– | 10–17.0 | 90,* 480† |
Calcite | CaCO3 = Ca2+ + CO32– | 10–8,4 | 100,* 500† |
Gypse | CaSO4 • 2H2O = Ca2+ + SO42– + 2H2O | 10–4,5 | 2 100 |
Sylvite | KCl = K+ + Cl– | 10+0,9 | 264 000 |
Epsomite | MgSO4 • 7H2O = Mg2+ + SO42– + 7H2O | –– | 267 000 |
Mirabillite | Na2SO4 • 10H2O = 2Na+ + SO42– + 10H2O | 10–1,6 | 280 000 |
Halite | NaCl = Na+ + Cl– | 10+1,6 | 360 000 |
La comparaison des solubilités minérales et des constantes d’équilibre indique que les grandeurs relatives de la constante d’équilibre sont un faible indicateur des solubilités relatives des minéraux car dans les relations d’équilibre, les activités des ions ou des molécules dépendent du nombre de moles dans l’expression de dissociation d’équilibre. Par exemple, la solubilité de la calcite dans l’eau pure à PCO2 = 10–1 bar est de 500 mg/ℓ, et la solubilité de la dolomite sous les mêmes conditions est presque identiques (480 mg/ℓ), mais les constantes d’équilibre diffèrent de huit ordres de grandeur parce que le terme [CO32–] est relaye au second plan dans l’expression Kdol. Un autre exemple est l’hydroxyapatite, qui a une solubilité de 30 mg/ℓ à pH 7 et a pourtant une constante d’équilibre de 10–55.6, une valeur qui pourrait donner l’impression erronée que ce minéral n’a pas une solubilité importante.
Tous les minéraux énumérés dans le Tableau 3.6 se dissolvent de manière congrue. Ceci signifie que les produits de la réaction de dissolution minérale sont toutes les espèces dissoutes. De nombreux minéraux qui affectent l’évolution chimique des eaux souterraines se dissolvent incongrument, c’est-à-dire qu’un ou plusieurs des produits de dissolution se produisent sous forme de minéraux ou en tant que substances solides amorphes. La plupart des silicates d’aluminium se dissolvent de façon incongrue. Le feldspath albite, est un bon exemple :
(3.49)
Dans cette réaction, l’albite se dissout sous l’action de la lixiviation de l’acide carbonique (H2CO3) pour produire des produits dissous et l’argile kaolinite. C’est une réaction commune dans les zones d’eaux souterraines en terrain granitique. Suivant la loi d’action de masse,
(3.50)
Où la constante d’équilibre K dépend de la température et de la pression. Si la pression partielle de CO2 est spécifiée, il ressort des Équations (3.18), (3.31), et (3.32) que [H2CO3] et sont également spécifiés. La solubilité de l’albite et d’autres cations aluminosilicates augmentent avec une pression partielle de CO2 croissante.
Effet de la force ionique
La comparaison des solubilités des minéraux dans l’eau pure par rapport à l’eau avec de fortes teneurs en sel indique que la salinité augmente les solubilités. C’est ce qu’on appelle l’effet de force ionique, car la forte solubilité est causée par la diminution des coefficients d’activité, en tant que résultat de l’accroissement de la force ionique. Par exemple, l’expression de la constante d’équilibre du gypse peut être écrite :
(3.51)
où γ est le coefficient d’activité et les espèces entre parenthèses sont exprimés en molalité. La figure 3.3 indique que, à mesure que la force ionique augmente, les valeurs de γCa2+ et γSO42- diminuent. Pour compenser, dans l’Équation (3.51), les concentrations de Ca2+ et SO42– doivent augmenter. Il en résulte une plus grande solubilité du minéral pour des conditions de température et de pression données. Cet effet est illustré sur la Figure 6, qui montre que la solubilité du gypse, plus que triple, en raison de l’effet de force ionique. D’autres exemples, décrits au Chapitre 7, indiquent que l’effet de force ionique peut jouer un rôle important dans l’évolution chimique des eaux souterraines naturelles et contaminées.
Les systèmes carbonatés
On estime que plus de 99 % du carbone terrestre est présent dans les minéraux carbonés, dont les plus importants sont la calcite, CaCO3 et la dolomite, CaMg(CO3)2. Dans presque tous les terrains sédimentaires et dans de nombreuses régions métamorphiques et ignées, les eaux souterraines sont en contact avec des minéraux carbonés pendant au moins une partie de l’histoire de leur écoulement. La capacité de la zone aquifère à minimiser les effets néfastes de nombreux types de polluants peuvent dépendre des interactions qui impliquent l’eau et les minéraux carbonatés. L’interprétation des données sur l’âge des eaux souterraines selon le carbone 14 nécessite de comprendre la façon dont l’eau a interagit avec ces minéraux.
À l’équilibre, les réactions entre l’eau et la calcite des minéraux carbonatés calcite et dolomite peuvent être exprimées tel que
(3.52)
(3.53)
où les constantes d’équilibre dépendent de la température et de la pression.
Si les minéraux se dissolvent dans de l’eau qui a une quantité abondante de CO22 dissous (exprimée en acide carbonique (H2CO3) reste constante, comme indiqué par l’Équation (3.18). Ceci est instructif pour représenter le processus de dissolution de la calcite :
(3.54)
Ce qui indique que la dissolution s’accompagne d’une consommation d’acide carbonique. Plus le PCO2 est élevée, plus la quantité de H2CO3 est disponible pour la consommation, et par conséquent la réaction continue davantage vers la droite pour atteindre l’équilibre.
Un système aqueux dans lequel le CO2 dissous est constant en raison d’une interaction relativement libre avec un environnement gazeux abondant et dont la PCO2 est constante, telle que l’atmosphère terrestre, est communément appelé dans le contexte de dissolution minérale système ouvert. Si le H2CO3 consommé par les interactions eau-minéral ne provient pas d’un réservoir gazeux, le système est appel système fermé.
Substitutions des Équations (3.18), (3.31), et (3.32) dans l’Équation (3.52) et réarrangement des produits :
(3.55)
Les termes entre parenthèses sont des activités et la PCO2 est exprimée en bar. Les valeurs pour les constantes d’équilibre comprises entre 0 et 30 °C sont listées dans le Tableau 3.7. À 25 °C, l’Équation (3.55) simplifiée :
(3.56)
Température (°C) |
|||||
0 | 1,12 | 6,58 | 10,62 | 8,340 | 16,56 |
5 | 1,20 | 6,52 | 10,56 | 8,345 | 16,63 |
10 | 1,27 | 6,47 | 10,49 | 8,355 | 16,71 |
15 | 1,34 | 6,42 | 10,43 | 8,370 | 16,79 |
20 | 1,41 | 6,38 | 10,38 | 8,385 | 16,89 |
25 | 1,47 | 6,35 | 10,33 | 8,400 | 17,0 |
30 | 1,67 | 6,33 | 10,29 | 8,51 | 17,9 |
Règles pour assigner des états d’oxydation :
Exemples: |
|||||||
Environnement carboné | Environnement de soufre | Environnement azotés | Environnement ferreux | ||||
Substance | État de C | Substance | État de S | Substance | État de N | Substance | État de Fe |
+IV | S | 0 | N2 | 0 | Fe | 0 | |
CO32– | +IV | H2S | –II | SCN– | +II | FeO | +II |
CO2 | +IV | HS– | –II | N2O | –III | Fe(OH)2 | +II |
CH2O | 0 | FeS2 | –I | NH4 | +III | FeCO3 | +II |
C6H12O6 | 0 | FeS | –II | NO | +V | Fe2O3 | +III |
CH4 | –IV | SO32– | +IV | NO | –III | Fe(OH)3 | +III |
CH3OH | –II | SO42– | +VI | HCN | –I | FeOOH | +III |
Pour calculer la solubilité de la calcite sous la pression partielle CO2 spécifiée, une autre équation est requise. A ce stade, pour ce type de problème d’équilibre eau-minéral, il convient d’utiliser l’équation de l’électro-neutralité. Pour le cas de la dissolution de la calcite dans l’eau pure, l’expression de l’électro-neutralité est
(3.57)
Les termes de cette équation sont exprimés en molalité. Pour la gamme d’intérêt de la PCO2 dans les études sur les eaux souterraines, les termes (H+) et (OH–) sont négligeables compares aux autres termes dans cette équation. Les équations (3.56) et (3.57) peuvent être combinées et par substitution les Équations (3.18), (3.31) et (3.32) peuvent être exprimées en polynôme en termes de deux des variables et en coefficients d’activité. Pour une PCO2 spécifique, des solutions itératives peuvent être obtenues par ordinateur. Des solutions manuelles peuvent aussi être obtenues avec peu de difficulté en utilisant la méthode des approximations successives décrites par Garrels et Christ (1965) et Guenther (1975). En première approximation, une approche pratique consiste à supposer que () est grand par rapport à (CO32–). La figure 3.5 (a) indique que cette hypothèse est valable pour des solutions avec des valeurs de pH au-dessous de 9, qui comprend presque toutes les eaux naturelles, pourvu que les concentrations de cations qui complexent avec CO32– soient faibles. L’équation (3.57) se réduit donc à
(3.58)
Après que la calcite se soit dissoute jusqu’à l’équilibre à une PCO2 spécifiée, les espèces dissoutes dans l’eau peuvent ensuite être obtenues à travers les étapes suivantes: (1) assigner une valeur arbitraire de [H+] à l’Équation (3.55), puis calculer une valeur pour [Ca2+]; (2) estimer la valeur de force ionique en utilisant le [Ca2+] obtenu à partir de l’étape (1) et une valeur obtenue à partir de l’Équation (3.58); (3) obtenir une estimation pour γCa2+ et à partir de la Figure 3.3 et ensuite calculer le (Ca2+) de la relation (Ca2+) = [Ca2+] / γCa2+; (4) utilisant la PCO2 spécifiée et le [H+] choisi à l’étape (1), calculer le [] à partir des équations (3.18) et (3.31); (5) convertir [] en () par la relation avec le coefficient d’activité ; Et (6) comparer la valeur de (Ca2+) obtenue à partir de l’étape (1) avec la valeur calculée de ()/2 de l’étape (5). Si les deux valeurs calculées sont égales ou proches, alors l’Équation (3.57) a été satisfaite et une solution au problème a été obtenue. S’ils sont inégaux, la séquence des étapes de calcul doit être répétés en utilisant une nouvelle sélection pour [H+]. Dans ces types de problèmes, une solution acceptable peut généralement être obtenue après deux ou trois itérations. Les résultats de ces types de calculs pour la dissolution de la calcite à l’équilibre dans de l’eau pure sous des paramètres différents de température et de PCO2 sont illustrés sur la Figure 3.7, qui indique que la solubilité dépend fortement de la PCO2 et que l’équilibre des valeurs de [H+] ou du pH varie fortement avec PCO2. La procédure de calcul n’a pas inclue des paires d’ions telles que et , qui apparaissent en de faibles concentrations dans des solutions aqueuses diluées saturées de CaCO3. A partir de la Figure 3.7, il apparait que les lignes de concentration Ca2+ et sont parallèles (a part la valeur de 0,30). Ceci indique que la réaction dans l’Équation (3.54) représente fidèlement le processus de dissolution dans la gamme des conditions de PCO2 caractéristiques de l’environnement des eaux souterraines, où PCO2 est presque invariablement supérieur à 10-4 bars.
Ceci explique pourquoi plutôt que CO32– est l’espèce ionique dominante du carbone inorganique dissous dans les eaux souterraines.
Si l’eau est chargée de CO2, ce qui peut se produire en raison du contact avec l’atmosphère terrestre ou avec la Zone Non Saturée, puis entre en contact avec la calcite ou la dolomite dans une zone isolée d’une source gazeuse de CO2, comme la zone d’eau souterraine, la dissolution se produira, mais la concentration des espèces dissoutes à l’équilibre sera différente. Dans ce processus de dissolution en système fermé, l’acide carbonique est consommé et non reconstitué à partir l’extérieur du système au fur et à mesure de la dissolution. Pour cette condition, l’Équation (3.18) indique que la PCO2 doit également se dérouler vers l’équilibre.
Les minéraux carbonés sont moins solubles dans des conditions de système fermé et ont des valeurs de pH a l’équilibre plus élevées. Dans le cas d’un système fermé, le carbone inorganique dissous est dérivé du CO2 dissous présent à mesure que la dissolution commence et que la calcite et/ou la dolomite se dissout. Dans le cas d’un système ouvert, le CO2 continue d’entrer dans la solution à partir de l’atmosphère au fur et à mesure de la dissolution. Dans ce cas, le carbone inorganique dissous total se compose du carbone du CO2 initiale et du CO2 réapprovisionné et aussi des minéraux. Comme indiqué dans le Chapitre 7, ces différences peuvent être cruciales pour l’interprétation de l’évolution chimique de l’eau souterraine en terrain carbonaté et dans l’évaluation de l’âge à partir du carbone 14.
L’effet d’ion commun
Dans certaines situations, l’addition d’ions par dissolution d’un minéral peut influencer la solubilité d’un autre minéral à un degré supérieur à l’effet exercé par le changement des coefficients d’activité. Si un électrolyte qui ne contient pas de Ca2+ ou CO32– est ajouté à une solution aqueuse saturée avec de la calcite, la solubilité de la calcite va augmenter en raison de l’effet de force ionique. Cependant, si un électrolyte est ajouté qui contient soit Ca2+ ou CO32–, la calcite va éventuellement précipiter car le produit [Ca2+] [CO32–] doit s’ajuster pour atteindre une valeur égale à la constante d’équilibre Kcal. Ce processus est connu sous le nom d’effet d’ion commun.
L’eau qui se déplace dans une zone aquifère contenant suffisamment de Ca2+ et CO32– pour que le produit d’activité soit égal à Kcal pourrait avoir rencontré des strates qui contiennent du gypse. La dissolution du gypse,
(3.59)
provoque une augmentation de la force ionique et une augmentation de la concentration de Ca2+. Exprimé en termes de molalité et de coefficients d’activité, l’expression d’équilibre pour la calcite est
La dissolution du gypse provoque la diminution du produit du coefficient d’activité γCa2+ · γCO32-. Mais en raison de la contribution de (Ca2+) à partir du gypse dissous, le produit (Ca2+) (CO32–) augmente de façon beaucoup plus élevé. Par conséquent, pour que la solution reste à l’équilibre au regard de la calcite, il doit se produire une précipitation de la calcite.
Les solubilités de la calcite et du gypse dans l’eau à diverses concentrations de NaCl sont présentées sur la Figure 3.8. Pour une valeur de NaCl donnée, la présence de chaque minéral, calcite ou gypse, entraîne une diminution de la solubilité de l’autre. En raison de l’effet de force ionique, les deux minéraux augmentent leur solubilité à des concentrations de NaCl plus élevées.
Indice de déséquilibre et de saturation
Compte tenu de l’Équation (3.2) dans un état de déséquilibre, la relation entre les réactifs et les produits peuvent être exprimés comme
(3.60)
où Q est le quotient de réaction et les autres paramètres sont exprimés dans l’Équation (3.3).
Le rapport suivant est une comparaison utile entre l’état d’un minéral dans une réaction dissolution-précipitation à un moment ou dans un espace particulier et les conditions d’équilibre thermodynamiques :
(3.61)
où Si s’appelle l’indice de saturation. Pour la calcite en contact avec les eaux souterraines (voir section 3.2), l’indice de saturation est
(3.62)
Les activités ioniques au numérateur peuvent être obtenues à partir de l’analyse d’échantillons des eaux souterraines et de l’Équation (3.32) et la constante d’équilibre Kcal peut être obtenue à partir des données d’énergie libre, ou directement à partir de tableaux des constantes d’équilibre, tel que le Tableau 3.7.
Si Si > 1, l’eau contient un excès de constituants ioniques. La réaction [Eq. (3.4)] doit donc procéder vers la gauche, ce qui nécessite que les précipitations minérales se produisent. Si Si < 1, la réaction se déroule vers la droite à mesure que le minéral se dissout. Si Si = 1, la réaction est à l’équilibre, ce qui signifie qu’elle est saturée au regard du minéral en question. Avec la relation de l’indice de saturation, il est possible pour des réactions eau-minéral donnés de comparer l’état des échantillons réels d’eau aux conditions d’équilibre calculées. Pour que l’indice de saturation soit intéressant, le minéral ne doit pas nécessairement être présent dans l’aquifère. La connaissance de la composition minéralogique est nécessaire, cependant, si l’on souhaite obtenir une compréhension détaillée du comportement géochimique et des contrôles sur l’eau.
Certains auteurs expriment l’indice de saturation sous forme logarithmique, auquel cas une valeur d’index de zéro indique l’état d’équilibre. L’indice de saturation est dans certaines publications dénotées comme l’indice de déséquilibre car dans certaines situations les eaux souterraines sont plus généralement déséquilibrées qu’a l’équilibre avec au regard des minéraux communs.
3.6 Processus d’oxydation et de réduction
États d’oxydation et réactions Redox
De nombreuses réactions qui se produisent dans l’environnement des eaux souterraines impliquent le transfert des électrons entre des constituants dissous, gazeux ou solides. À la suite du transfert l’électron, il y a des changements dans les états d’oxydation des réactifs et des produits. L’état d’oxydation, parfois référé à un nombre d’oxydation, représente une charge hypothétique qu’un atome aurait si l’ion ou la molécule devait se dissocier. Les états d’oxydation qui peuvent être atteints par les éléments les plus importants à l’état de multi-oxydation qui se produisent dans les eaux souterraines sont énumérés dans le Tableau 3.8 ; ils contiennent également certaines règles qui peuvent être utilisées pour en déduire l’état d’oxydation à partir de la formule d’une substance. Parfois, il existe des incertitudes dans l’attribution d’une perte ou d’un gain d’électrons pour un atome particulier, spécialement lorsque les réactions impliquent des liaisons covalentes. Dans ce livre, les chiffres romains sont utilisés pour représenter les états d’oxydation et les chiffres arabes représentent la valence réelle.
Règles pour assigner des états d’oxydation :
Exemples : |
|||||||
Environnement carboné | Environnement de soufre | Environnement azotés | Environnement ferreux | ||||
Substance | État de C | Substance | État de S | Substance | État de N | Substance | État de Fe |
+IV | S | 0 | N2 | 0 | Fe | 0 | |
CO32– | +IV | H2S | –II | SCN– | +II | FeO | +II |
CO2 | +IV | HS– | –II | N2O | –III | Fe(OH)2 | +II |
CH2O | 0 | FeS2 | –I | NH4 | +III | FeCO3 | +II |
C6H12O6 | 0 | FeS | –II | NO | +V | Fe2O3 | +III |
CH4 | –IV | SO32– | +IV | NO | –III | Fe(OH)3 | +III |
CH3OH | –II | SO42– | +VI | HCN | –I | FeOOH | +III |
Dans les réactions d’oxydoréduction, qui seront appelées réactions redox, il n’y a pas d’électrons libres. Toute oxydation s’accompagne d’une réduction et vice-versa, de sorte qu’un équilibre électronique soit toujours maintenu. Par définition, l’oxydation est la perte d’électrons et la réduction est le gain en électrons. Ceci est illustré en exprimant la réaction redox du bœuf pour l’oxydation du fer pour l’oxydation de fer :
(3.63)
Pour chaque système redox, les demi-réactions sous la forme suivante peuvent être écrites :
état oxydé + ne = état reduit(3.64)
La reaction redox pour le fer doit cependant etre expromee en demi-reactions,
(3.65)
(3.66)
Dans la demi-réaction de réduction, le stade d’oxydation de l’oxygène va de zéro (oxygène en tant que O2) à -II (oxygène de H2O). Il y a, cependant, une libération de quatre électrons car 2 mols de H2O forme de 1 mol de O2 à 4 mol de H+. Dans la demi-réaction d’oxydation, 4 mol de Fe(+II) va de 4 mol de Fe(+III), avec un gain de quatre électrons. La réaction redox complète [Eq. (3.63)] exprime l’effet net du transfert d’électrons et par conséquent ne contient plus d’électrons. Lorsqu’on écrit une demi-réaction, une attention doit être portée pour assurer que les électrons de chaque côté de l’équation soient équilibrés. Ces réactions ne nécessitent pas d’impliquer l’oxygène et l’hydrogène, bien que la plupart des réactions redox qui se passent dans les eaux souterraines impliquent ces éléments. Le concept d’oxydation et de réduction en termes de chargement de stades d’oxydation sont illustrés sur la Figure 3.9.
Une liste des demi-réactions qui représente la plupart des processus redox se produisant dans les eaux souterraines est présentée au Tableau 3.9.
(1) | (18) | ||
(2) | (19) | ||
(3) | (20) | ||
(4) | (21) | ||
(5) | (22) | ||
(6) | (23) | ||
(7) | (24) | ||
(8) | (25) | ||
(9) | (26) | ||
(10) | (27) | ||
(11) | (28) | ||
(12) | (29) | ||
(13) | (30) | ||
(14) | (31) | ||
(15) | (32) | ||
(16) | (33) | ||
(17) |
Consommation d’oxygène et de matière organique
Les rivières et les lacs non pollués ont généralement des conditions oxydantes en raison du mélange avec de l’oxygène de l’atmosphère terrestre. La tendance dans les systèmes d’eaux souterraines, cependant, concerne l’épuisement de l’oxygène et les conditions de réduction parce que l’eau qui circule à travers la zone des eaux souterraines est généralement isolée de l’oxygène de l’atmosphère terrestre, consommé par les réactions hydro-chimiques et biochimiques et qui n’est pas reconstitué. Pour que la réduction des constituants inorganiques se produise, certains autres constituants doivent être oxydés. L’environnement oxydé est généralement la matière organique. Les réactions sont catalysées par des bactéries ou des enzymes isolées qui dérivent de l’énergie en facilitant le processus de transfert d’électrons. Dans la présente discussion, nous supposerons que les réactions se déroulent dans une direction thermodynamique appropriée, sans clarifier les processus biochimiques associés. Pour illustrer les processus d’oxydation de la matière organique, un hydrate de carbone simple, CH2O, est utilisé comme donneur d’électrons, bien que de nombreux autres milieux organiques, tels que les polysaccharides, les saccharides, les acides gras, les acides aminés et les phénols, peuvent être les réels milieux organiques impliqués dans le processus redox.
(3.67)
Pour obtenir des réactions complètes pour les processus redox, la demi-réaction pour l’oxydation de la matière organique, représentée par l’Équation (3.67), peut être combinée avec beaucoup de demi-réactions pour la réduction des milieux inorganiques indiqués dans le Tableau 3.9. La combinaison de l’Équation (3.67) et la réaction (1) dans le Tableau 3.9 donne l’équation redox suivante :
(3.68)
qui représente le processus d’oxydation de la matière organique en présence de des bactéries et de l’oxygène moléculaire libre. Ce processus redox est la principale source de dissolution du CO2 qui se combine avec H2O pour produire H2CO3 [Eq. (3.15)], qui est un acide d’une force considérable lorsqu’on le regarde dans un contexte géo-chimique.
Parce que la solubilité de O2 dans l’eau est faible (9 mg/ℓ à 25 °C et 11 mg/ℓ à 5 °C), et parce que le réapprovisionnement en O2 dans les environnements souterrains est limité, l’oxydation d’une petite quantité de matière organique seulement peut entraîner la consommation de tout l’O2 dissous. Par exemple, à partir des relations de conservation de masse inhérentes à l’Équation (3,68), l’oxydation de seulement 8,4 mg/ℓ (0,28 mmol/ℓ) de CH2O consommerait 9 mg/ℓ (0,28 mmol/ℓ) de O2. Cela se déroulerait dans de l’eau n’ayant pas de O2 dissous. L’eau qui s’infiltre dans la zone du sol est normalement en contact avec la matière organique du sol matière. La consommation de O2 et la production de CO2 est donc un processus généralisé dans la partie très peu profonde de l’environnement souterrain.
Le Tableau 3.10 répertorie certaines réactions redox dans lesquelles l’oxygène dissous est consommé. Dans toutes ces réactions, des ions H+ sont produits. Dans de nombreux systèmes aquifères, les ions H+ sont consommés par des réactions avec des minéraux. Le pH ne diminue donc pas sensiblement. Dans certains systèmes, cependant, les minéraux qui réagissent de cette manière ne sont pas présent, auquel cas les processus d’oxydation provoquent l’acidité de l’eau.
Processus | Réaction* | |
Oxydation du sulfure | (1) | |
Oxydation du fer | (2) | |
Nitrification | (3) | |
Oxydation du manganèse | (4) | |
Oxydation du sulfure de fer† | (5) |
Lorsque tout l’oxygène O2 dissout dans les eaux souterraines a été consommé, l’oxydation de la matière organique peut encore se produire, mais les agents oxydants (c.-à-d., les constituants qui subissent la réduction) sont , MnO2, Fe(OH)3, SO42–; et autres comme indiqué dans le Tableau 3.11. Comme ces agents oxydants sont consommés, l’environnement des eaux souterraines devient de plus en plus réduit. Si les processus se déroulent davantage, l’environnement pourra devenir fortement réducteur au niveau où les milieux organiques peuvent subir des dégradations anaérobies. Une équation pour ce processus, qui représente la conversion de la matière organique au méthane et au dioxyde de carbone, est représentée par la réaction (5) dans le Tableau 3.11. La séquence des processus redox représentée par les réactions (1) à (5) dans le Tableau 3.11 procède à l’oxydation aérobie à la fermentation du méthane à condition que (1) la matière organique sous une forme consommable continue d’être disponible dans l’eau, (2) les bactéries qui s’interposent entre les réactions ont des nutriments suffisants pour maintenir leur existence, et (3) les variations de température ne sont pas assez importantes pour perturber les processus biochimiques. Dans de nombreux systèmes aquifères, un ou plusieurs de ces facteurs sont limitants, de sorte que les eaux souterraines ne procèdent pas à toutes les étapes redox. L’évolution des eaux souterraines par différents stades d’oxydation et la réduction est décrite plus en détail au Chapitre 7.
Processus | Equation* | |
Dénitrification† | (1) | |
Réduction du Manganèse (IV) | (2) | |
Réduction du fer (III) | (3) | |
Réduction des sulfate‡ | (4) | |
Fermentation du méthane | (5) |
Conditions d’équilibre Redox
Les solutions aqueuses ne contiennent pas d’électrons libres, mais il est néanmoins pratique d’exprimer les processus redox en demi-réactions puis manipuler les demi-réactions comme s’il s’agissait de processus distincts. Dans ce cadre, un paramètre connu sous le nom de pE est utilisé pour décrire l’activité relative des électrons. Par définition,
(3.69)
pE, qui est une quantité sans dimension, est analogue à l’expression du pH pour le proton (Hydrogène-ion). Le pE d’une solution est une mesure de l’oxydation ou de réduction de la tendance de la solution. Parallèlement à la convention arbitraire assignant ΔG° = 0 pour l’hydratation de H+ (c.-à-d., KH+ = 0 pour la réaction H+ + H2O = H3O+), le changement d’énergie libre pour la réduction de H+ à H2(g) [H+ + e = H2(g)] est nul. Le pE et le pH sont des fonctions de l’énergie libre impliquée dans le transfert de 1 mole de protons ou d’électrons, respectivement.
Pour la demi-réaction générale
(3.70)
la loi d’action de masse peut être écrite comme suit :
(3.71)
Par exemple, considérons l’oxydation du Fe (II) en Fe (III) par l’oxygène libre :
(3.72)
(3.73)
(3.74)
Dans ce livre, les constantes d’équilibre pour les demi-réactions sont toujours exprimées sous la forme de réduction. Les formes oxydées et les électrons sont écrits à gauche et les produits réduits sur la droite. Ceci est connu sous le nom de convention de Stockholm ou IUPAC (Union Internationale de la Physique et Chimie Analytique), exprimant les demi-réactions [Eq. (3.72) et (3.73)] en termes de constantes d’équilibre [Eq.(3.71)] pour des conditions à 25 °C et 1 bar de rendement.
(3.75)
(3.76)
Les valeurs numériques pour les constantes d’équilibre ont été calculées à partir de l’équation. (3.12) en utilisant les données d’énergie libre de Gibbs pour 25 °C et 1 bar. Pour obtenir des expressions pour les conditions redox exprimées en pE, les Équations (3.75) et (3.76) peuvent être réarrangés pour produire
(3.77)
(3.78)
Si la réaction redox [Eq. (3.74)] est à l’équilibre, et si les concentrations de fer, de PO2 et le pH sont connus, le pE obtenu à partir de ces deux relations est le même. Bien qu’il puisse y avoir beaucoup d’espèces dissoutes dans la solution impliquée dans les réactions avec le transfert d’électrons et d’ions hydrogène, à l’équilibre il n’y a que une condition de pE, tout comme il n’y a qu’une seule condition de pH. Dans les systèmes eaux souterraines, il existe une interdépendance du pH et du pE. Presque toutes les réactions répertoriées dans le Tableau 3.9 impliquent à la fois des transferts d’électrons et de protons. Si l’équilibre est supposé, les réactions qui incluent le pH peuvent être écrites comme expressions de pE. Les représentations graphiques des relations pH-pE sont décrites ci-dessous.
Bien que la discussion ci-dessus repose entièrement sur l’hypothèse que les processus redox sont à l’équilibre, dans les situations de terrain, les concentrations d’oxydes et les espèces réductibles peuvent être loin de celles prévues en utilisant l’équilibre des modèles. De nombreuses réactions redox se déroulent à un rythme lent et beaucoup sont irréversibles. Il est donc possible d’avoir plusieurs niveaux redox différents existant dans un même lieu. Il existe également la possibilité que la bactérie soit nécessaire pour catalyser beaucoup de réactions redox existant dans les microenvironnements des milieux poreux qui ne sont pas représentatif des macro-environnements globaux dans lequel le grand flux d’eaux souterraines se déroulent. Les considérations d’équilibre peuvent, cependant, contribuer grandement à nos efforts et à comprendre de manière générale les conditions redox observées dans les eaux souterraines. Stumm et Morgan (1970), dans leur texte de compréhension sur la chimie aquatique, déclare que : « Dans toutes les circonstances, les calculs d’équilibre fournissent des conditions aux limites vers lesquelles les systèmes doivent se dérouler. En outre, les équilibres partiels (ceux qui impliquent certains mais pas tous les couples redox) sont fréquemment abordés, même si l’équilibre total n’est pas atteint. . . . Un aperçu précieux est acquis même lorsque des différences sont observées entre les calculs et les observations. Le manque d’équilibre et la nécessité d’informations supplémentaires ou de théorie plus sophistiquée est alors claire » (p. 300).
La condition redox pour que les processus d’équilibre puissent être exprimés en termes de pE (dimensions libres), Eh (volts), ou ΔG (joules ou calories). Bien que ces dernières années pE est devenu un paramètre couramment utilisé dans les études redox, Eh est devenu le paramètre redox communément utilisé dans de nombreuses études, en particulier avant les années 1970. Eh est communément appelé potentiel redox et est défini comme l’énergie acquise dans le transfert de 1 mole d’électrons d’un oxydant à H2. Le h dans Eh indique que le potentiel est sur une échelle d’hydrogène et E symbolise la force électromotrice. pE et Eh sont liés par le formule
(3.79)
où F est la constante de Faraday (9,65 × 104 C • mol–1), R la constante de gaz parfait, T la température absolue, et n le nombre d’électrons dans la demi-réaction. Pour les réactions à 25 °C dans lesquelles les demi-réactions sont exprimées en termes de transfert d’un seul électron, l’Équation (3.79) devient :
(3.80)
Eh est défini par une relation appelée équation de Nernst,
(3.81)
où Eh° est une condition standard ou de référence à laquelle toutes les substances impliquées sont à l’unité de l’activité et n est le nombre d’électrons transférés. C’est une convenance thermodynamique. Les activités de l’unité ne peuvent exister que dans des solutions de dilution infinie ; cette condition est donc seulement hypothétique. L’équation liant directement de Eh° à la constante d’équilibre est
(3.82)
Dans l’étude des systèmes aqueux, les mêmes objectifs peuvent être satisfaits soit par pE soit par ou Eh pour représenter les conditions redox. pE est souvent le paramètre préféré car sa formulation suit simplement des représentations à demi-cellule des réactions redox dans la combinaison avec la loi d’action de masse. La facilité à faire des calculs de façon interchangeable entre pE et Eh est souhaitable car les tableaux de thermodynamique pour les données sur les réactions redox sont communément exprimées en valeurs Eh° et parce que certains systèmes aqueux sont un moyen pratique d’obtenir une indication des conditions redox impliquant des mesures des potentiels d’électrode en tant que tension.
Facteurs microbiologiques
Les microorganismes catalysent presque toutes les réactions redox importantes qui se produisent dans les eaux souterraines. Cela signifie que bien que les réactions soient spontanées thermodynamiquement, ils nécessitent l’effet catalyseur des microorganismes afin de continuer à un taux significatif. Bien qu’il ne soit pas habituel que les microorganismes soient considérés comme des composants importants de l’environnement des eaux souterraines, leur influence ne peut être rejetée si nous voulons comprendre les causes et les effets des processus redox.
Les microorganismes les plus importants dans les processus redox dans les milieux des eaux souterraines sont des bactéries. D’autres types de microorganismes, comme les algues, les champignons, les levures et les protozoaires, peuvent être importants dans d’autres milieux aqueux. Les bactéries ont généralement une taille comprise entre environ 0,5 et 3 μm. Elles sont petites par rapport aux tailles de pores dans la plupart des matériaux géologiques non-indurés et sont importantes par rapport à la taille des ions et des molécules inorganiques hydratés. La capacité catalytique des bactéries sont produites par l’activité des enzymes qu’elles produisent normalement. Les enzymes sont des protéines formées par des organismes vivants qui ont le pouvoir d’augmenter le taux de réactions redox en diminuant les énergies d’activation des réactions. Elles accomplissent cela en interagissant fortement avec des molécules complexes représentant des structures moléculaires à mi-chemin entre le réactif et le produit (Pauling et Pauling, 1975). L’environnement moléculaire local de beaucoup de réactions enzymatiques est très différent de l’environnement global du système aqueux.
Les bactéries et leurs enzymes sont impliqués dans les processus redox afin d’acquérir l’énergie pour la synthèse de nouvelles cellules et la maintenance de cellules anciennes. Une étape importante dans le processus de croissance cellulaire bactérienne est la construction de molécules formant une substance de stockage d’énergie connue sous le nom d’adénosine triphosphate (ATP). Après sa formation, les molécules de ce matériau à haute énergie peuvent être hydrolysées par une séquence de réactions de libération d’énergie qui fournissent la synthèse d’une nouvelle cellule. La croissance des bactéries est donc directement liée au nombre de moles d’ATP formées à partir des nutriments disponibles. Une partie de l’énergie obtenue des réactions redox est l’énergie de maintenance requise par les cellules bactériennes pour de telles choses comme la mobilité, pour empêcher un flux indésirable de solutés, soit dans la cellule ou en dehors de cette dernier, ou pour la resynthèse des protéines qui se dégradent constamment (McCarty, 1965).
Pour que les bactéries puissent utiliser un rendement énergétique à partir d’une réaction redox, un changement minimal d’énergie libre d’environ 60 kJ/mol entre les réactifs et les produits sont nécessaires (Delwiche, 1967). La principale source d’énergie pour les bactéries dans le milieu des eaux souterraines est l’oxydation de la matière organique.
Les bactéries qui ne peuvent prospérer qu’en présence d’oxygène dissout sont connues sous le nom de bactéries aérobies. Les bactéries anaérobies nécessitent une absence d’oxygène dissous. Quelques bactéries facultatives peuvent prospérer avec ou sans oxygène. La limite inférieure de O2 dissout pour l’existence de la plupart des bactéries aérobies est estimée à environ 0,05 mg/ℓ, mais certaines espèces aérobies peuvent persister à des niveaux inférieurs. Étant donné que la plupart des méthodes utilisées pour mesurer l’oxygène dissout O2 ont une limite de détection inférieure d’environ 0,1 mg/ℓ, il est possible que les bactéries aérobies puissent prendre en compte les réactions redox dans des situations qui peuvent sembler anaérobie basée sur le manque d’oxygène détectable.
Les bactéries de différentes variétés peuvent résister à des pressions fluides de plusieurs centaines des bars, dans des conditions de pH de 1 à 10, températures de près de 0 à plus de 75 °C, et des salinités beaucoup plus élevées que celles de l’eau de mer. Ils peuvent migrer à travers des matériaux géologiques poreux et dans des environnements défavorables pouvant évoluer vers les corps résistants qui peuvent être activés ultérieurement (Oppenheimer, 1963). Malgré ces caractéristiques apparentes de robustesse, il existe de nombreux milieux des eaux souterraines dans lesquels la matière organique n’est pas oxydée à un rythme appréciable. En conséquence, les conditions redox n’ont pas diminué à des niveaux faibles même si des centaines ou des milliers d’années ou plus ont été disponibles pour les réactions de se produire. Si les réactions redox qui nécessitent une catalyse bactérienne ne se produisent pas à des taux significatifs, un manque d’un ou plusieurs des nutriments essentiels pour les bactéries La croissance est probablement la cause. Il existe différents types d’éléments nutritifs. Certains sont nécessaires pour l’incorporation dans la masse cellulaire des bactéries. Le carbone, l’azote, le soufre, et des composés phosphoreux et de nombreux métaux sont dans cette catégorie. D’autres éléments nutritifs sont des substances qui fonctionnent comme des donneurs d’électrons ou des sources d’énergie, comme l’eau, l’ammoniac, le glucose et le H2S, et des substances qui fonctionnent comme accepteurs d’électrons, tel que l’oxygène, le nitrate et le sulfate. Les macronutriments sont les substances qui sont requises en grandes quantités en tant que blocs de construction directs dans la construction cellulaire. Les micronutriments sont nécessaires en quantités si petites qu’elles sont difficiles à détecter. Les exigences en macronutriment des nombreuses bactéries sont similaires ou identiques. Les exigences en micronutriment, sont plus susceptibles de différer d’une espèce de bactérie à une autre (Brock, 1966).
Bien que les bactéries jouent un rôle important dans l’environnement géochimique des eaux souterraines, l’étude des bactéries à des profondeurs situées en profondeur a encore été très peu réalisée. Les prochaines décennies devraient produire des développements intéressants dans ce domaine de recherche.
Diagrammes pE-pH
Les graphiques qui montrent l’occurrence d’équilibre des ions ou des minéraux comme domaines relatifs au pE (ou Eh) et au pH sont connus sous le nom de diagramme pE-pH ou Eh-pH. Pendant le années 1950, les diagrammes de ce type ont été développés par M. J. N. Pourbaix et ces collaborateurs au Centre Belge d’Etude de la Corrosion comme outil pratique en chimie appliquée. Les résultats de ce travail sont résumés par Pourbaix et al. (1963). Suivant les méthodes développées par le groupe Belge, R. M. Garrels et ses collègues ont été les pionniers a se lancer dans les applications de l’analyse des systèmes géologiques. L’utilisation des diagrammes pE-pH se sont répandus dans la géologie, la limnologie, l’océanographie et la pédologie. Dans les enquêtes sur la qualité des eaux souterraines, un accent considérable est maintenant mis dans la compréhension des processus qui contrôlent les occurrences et la mobilité des éléments mineurs et traces. Les diagrammes pE-pH sont une aide importante dans cette préoccupation. La discussion suivante de ces diagrammes n’est qu’une brève introduction. La condition redox sera représentée par pE plutôt que par Eh, mais c’est juste une question de convenance. Les traitements compréhensive de ce sujet sont présentés dans les textes par Garrels et Christ (1965), Stumm et Morgan (1970), et Guenther (1975). Un aperçu concis des méthodes de construction des diagrammes Eh-pH sont fournis par Cloke (1966).
Puisque nous sommes intéressés par l’occurrence d’équilibre (c.-à-d., la stabilité) de la dissolution des espèces dissoutes et des minéraux en milieu aqueux, une première étape appropriée de la prise en compte des relations pE-pH consiste à déterminer les conditions dans lesquelles H2O est stable. À partir des demi-réactions redox
(3.83)
(3.84)
Nous avons obtenu dans les conditions de 25 °C,
(3.85)
(3.86)
Ces relations sont tracées en lignes droites (1 et 2) sur le schéma pE-pH montré sur la Figure 3.10 (a).
À titre d’exemple pour l’explication des domaines de stabilité des ions et des minéraux, le système Fe-H2O représenté à la Figure 3.10 sera considéré. Dans les eaux souterraines, le fer en solution est normalement présent principalement comme Fe2+ et Fe3+. Ce sont les seuls espèces qui sont comptabilisées dans notre analyse. Dans un traitement plus détaillé, les complexes tels que Fe(OH)2+2+, et seraient inclus. Les composés solides qui peuvent se produire dans le système Fe-H2O sont répertoriés dans le Tableau 3.12. Une série de réactions de réduction impliquant un matériau solide (composé de fer) et H+ et e comme réactifs, un composé solide plus réduit et de l’eau comme produits peuvent être écrites pour les composés dans ce tableau. Par exemple,
(3.87)
Exprimant cette réaction sous forme de masse, avec des activités des phases d’eau et de solide, prises comme unité (pour les raisons indiquées à la Section 3.2), donne le rendement
(3.88)
État d’oxydation | Substances solides |
0 | Fe |
II | FeO, Fe(OH)2 |
II et III | Fe3O4 |
III | Fe2O3, Fe(OH)3, FeOOH |
Et la forme logarithmique,
log K – pH – pE = 0 (3.89)
La constante d’équilibre dans cette équation peut être obtenue en utilisant l’Équation (3.12) et les gammes de valeurs de l’énergie libre de formation de Gibbs (), comme indiqué dans la Section 3.2. L’équation (3.89) est représentée comme une ligne sur un schéma pE-pH comme indiqué dans Figure 3.10 (b) (ligne 3). Dans le domaine pE-pH au-dessus de cette ligne, Fe(OH)3 est stable; au-dessous, elle est réduite à Fe(OH)2. Ce sont les champs de stabilité pour ces deux composés solides du fer. Les lignes représentant les nombreuses autres réductions des équations obtenues en faisant réagir les solides dans le Tableau 3.12 avec H+ et e pour former plus des composés réduits et H2O, peuvent être construits sur le schéma pE-pH. Cependant, ces lignes sont situées en dehors du champ de stabilité pour H2O [c.-à-d., au-dessus et en dessous des lignes (1) et (2)], et ne présentent donc aucun intérêt pour les études sur les eaux souterraines.
Dans la plupart des études sur les eaux naturelles, l’intérêt est concentré sur les espèces dissoutes ainsi que sur les phases minérales. Par conséquent, des informations sur les concentrations d’équilibre des espèces dissoutes sont habituellement incluses sur les diagrammes de pE-pH. Comme illustration, le système Fe(OH)3 sera considéré plus loin. L’état d’oxydation du fer dans Fe(OH)3 est +III. La dissociation du Fe(OH)3 modérément cristallin a dans l’eau est
(3.90)
La loi d’action de mass produit
(3.91)
De l’Équation (3.12), une valeur de +0.32 est obtenue pour le journal K. La relation masse-action peut être exprimée comme
(3.92)
qui trace comme une ligne verticale sur le diagramme pE-pH. Si le pH est spécifié, la ligne obtenu à partir de cette expression représente l’activité d’équilibre de Fe3+ qui existe dans une solution aqueuse en contact avec la phase solide, Fe(OH)3. L’équation (3.92) indique que l’activité Fe3+ augmente à des valeurs de pH inférieures. Dans la construction des diagrammes pE-pH, une procédure commune consiste à choisir une condition de pH à laquelle l’activité des espèces dissoutes est à un niveau considéré comme négligeable. Le choix de ce niveau dépend de la nature du problème. À des fins d’illustration, deux lignes sont représentées sur la Figure 3.10 (b) [lignes (4) et (5), qui représentent l’activité de Fe3+ de 0–5 et 10–6]. Bien qu’en théorie ces lignes représentent des activités, et donc sont sans dimension, ils peuvent être valables comme représentant la molalité, car les coefficients d’activité des solutions à faible salinité sont presque égaux à l’unité.
Dans des conditions de faibles pE, Fe2+ est l’espèce importante de fer dissous. La réaction est
(3.93)
De la relation de l’action de masse, l’expression suivante est dérivée :
(3.94)
Pour les valeurs [Fe2+] de 10–5 et 10–6, cette équation est représentée à la Figure 3.10 par les lignes (6) et (7), respectivement. Les lignes ont été superposées uniquement sur la partie du diagramme dans lequel Fe(OH)2 est la phase solide stable. Mais Fe2+ existe également à une certaine activité d’équilibre dans la partie du diagramme dans laquelle Fe(OH)3 est la phase solide stable. Fe2+ et Fe(OH)3 sont reliés par la demi-réaction redox
(3.95)
De la relation de l’action de masse
(3.96)
ou KFe(OH)3 = 13.30. Sur la Figure 3.10 (b), cette expression est représentée comme lignes (8) et (9) pour [Fe2+] valeurs de 10–5 et 10–6, respectivement.
La figure 3.10 (c) est une version simple du schéma pE-pH. Il illustre la forme générale dans laquelle les diagrammes de type pE-pH sont normalement présentés dans la littérature. Il est important de garder à l’esprit que les limites entre phases solides et les espèces dissoutes sont basées sur des valeurs d’activité spécifiées, et que la validité de toutes les lignes comme conditions d’équilibre thermodynamiquement définies dépendent de fiabilité des données d’énergie libre utilisées dans la construction du diagramme. Dans l’exemple ci-dessus, il existe une grande incertitude dans la position de certaines limites car la phase solide, Fe(OH)3, est une substance de cristallinité variable qui a différentes valeurs en fonction de sa cristallinité.
Au Chapitre 9, les diagrammes pE-pH sont utilisés dans la prise en compte d’autres constituants dissouts dans les eaux souterraines. Bien que certains diagrammes de type pE-pH apparaissent complexe, leur construction peut être accomplie par des procédures moins élaborés que ceux décrits ci-dessus.
3.7 Adsorption et échange d’ion
Mécanismes
Les matériaux géologiques poreux composés d’un pourcentage appréciable de particules de taille colloïdale ont la capacité d’échanger des constituants ioniques adsorbés sur les surfaces des particules. Les particules colloïdales ont des diamètres compris entre 10–3–10–6 mm. Elles sont importantes par rapport à la taille des petites molécules, mais suffisamment petites pour que les forces inter-faciales soient significatives dans le contrôle de leur comportement. La plupart des minéraux argileux sont de taille colloïdale. Les produits géochimiques des roches sont souvent des colloïdes inorganiques, amorphes (non cristallisés ou mal cristallisés), dans un état métastable persistant. Ces produits d’altération colloïdale peuvent se produire sous forme de revêtements sur les surfaces de particules beaucoup plus grandes. Même un dépôt qui semble être composé de sable propre ou de gravier peut avoir une teneur importante en colloïde.
Les processus d’échange d’ions sont presque exclusivement limités aux particules colloïdales, car ces particules ont une grande charge électrique par rapport à leurs surfaces. La charge superficielle est le résultat (1) d’imperfections ou de substitutions ioniques dans le réseau cristallin ou (2) de réactions de dissociation chimique à la surface de la particule. Les substitutions ioniques provoquent une charge nette positive ou négative sur le réseau cristallin. Ce déséquilibre de charge est compensé par une accumulation superficielle d’ions de charge opposée, connue sous le nom de contre-ions. Les contre-ions comprennent une couche adsorbée de composition modifiable. Les ions de cette couche peuvent être échangés contre d’autres ions, à condition que le déséquilibre de la charge électrique dans le réseau cristallin continue d’être équilibré.
Dans les matériaux géologiques, les colloïdes qui présentent typiquement une charge de surface causée principalement par la substitution ionique sont les minéraux argileux. Les argiles minérales communes peuvent être subdivisés en cinq groupes : le groupe de la kaolinite, le groupe de la montmorillonite (souvent appelé le groupe de la smectite), le groupe illite, le groupe chlorite et le groupe vermiculite. Chaque groupe peut inclure quelques ou plusieurs variétés composites et structurelles avec des noms minéraux distincts. Cependant, les cinq groupes, sont tous de type de couches aluminosilicates. La structure et la composition de ces groupes sont décrites en détail dans les monographies sur la minéralogie de l’argile par Grim (1968) et sur l’échange d’ions par Van Olphen (1963).
La silice, étant l’oxyde le plus commun dans la croûte terrestre et l’un des oxydes les plus simples, se caractérise par des surfaces chargées électriquement. Les surfaces contiennent des ions qui ne sont pas complètement coordonnés et ont donc des charges non équilibrées. Dans le vide, la charge nette est extrêmement faible. Lors de l’exposition à l’eau, les sites chargés sont transformés en groupes hydroxydes de surface qui contrôlent la charge sur la surface minérale. La charge de surface est développée en raison de la dissociation des groupes OH– adsorbés sur la surface particulière. Pour neutraliser cette charge, une couche adsorbée de cations et d’anions se forme dans une zone adjacente à la couche hydroxylée. Parcs (1967) déclare que des conditions de surface hydroxylée devraient être attendues sur tous les matériaux oxydes qui ont eu l’opportunité d’arriver à l’équilibre avec l’environnement aqueux. Selon que la dissociation du groupe hydroxyde est principalement acide ou basique, la charge nette sur la couche hydroxylée peut être négative ou positive. La charge de surface peut également être produite par adsorption de complexes ioniques chargés.
La nature de la charge de la surface est fonction du pH. À faible pH, une surface chargée positivement prévaut. À un pH élevé, une surface à charge négative se développe. À un pH intermédiaire, la charge sera nulle, une condition connue sous le nom de point de charge zéro (pHzpc). La tendance à l’adsorption des cations ou des anions dépend donc du pH de la solution.
Capacité d’échange cationique
La Capacité d’Echange de Cations (CEC) d’un matériau colloïdal est définie par Van Olphen (1963) comme l’excès de contre-ions dans la zone adjacente à la surface ou couche chargée qui peut être échangée contre d’autres cations. La capacité d’échange de cations de matériaux géologiques est normalement exprimée en nombre de milliéquivalents de cations qui peuvent être échangés dans un échantillon avec une masse sèche de 100 g. Le test standard pour déterminer la CEC de ces matériaux implique (1) la saturation des sites d’échange avec le en mélangeant l’échantillon de sol avec une solution d’acétate d’ammonium, (2) l’ajustement du pH de l’eau des pores à 7,0, (3) le retrait du adsorbé par lixiviation avec une forte solution de NaCl (Na+ remplace sur les sites d’échange), et (4) la détermination de la teneur en de la solution de lixiviation après atteinte d’équilibre. Les valeurs de la CEC obtenues à partir de tests standards de laboratoire sont une mesure de la capacité d’échange dans les conditions spécifiques du test. Pour les minéraux qui doivent leur capacité d’échange aux réactions de dissociation chimique sur leurs surfaces, la capacité d’échange réelle dépend fortement du pH.
Le concept de capacité d’échange de cations et sa relation avec les minéraux d’argile et la substitution isomorphe est illustré par l’exemple suivant, adapté de Van Olphen (1963). Considérons une argile montmorillonitique dans laquelle 0,67 mole de Mg se produit en substitution iso-morphique pour Al dans l’octaèdre d’alumine du réseau cristallin. La formule de cellule unitaire pour le réseau de cristaux de montmorillonite peut être exprimée comme
où Ex désigne les cations interchangeables. On supposera que les cations échangeables sont entièrement Na+. A partir du poids atomique des éléments, le poids de la formule de cette montmorillonite est 734. Par conséquent, à partir du nombre d’Avogadro, 734 g de cette argile contient 6,02 × 10–23 cellules unitaires. La cellule unitaire est la plus petite unité structurale à partir de laquelle les particules d’argile sont assemblées. Les dimensions typiques des cellules unitaires pour la montmorillonite, déterminées à partir des analyses de diffraction des rayons X, sont de 5,15 Å et 8,9 Å (angströms) dans le plan des feuilles octaédriques-tétraédriques. L’espacement entre les feuilles varie de 9 à 15 Å selon la nature des cations adsorbés et des molécules d’eau. La surface totale de 1 g d’argile est
Pour équilibrer la charge négative causée par la substitution du Mg, 0,67 mole de cations monovalents, dans ce cas Na+ est nécessaire pour 734 g d’argile. Exprimé dans les unités normalement utilisées, la capacité d’échange de cations est donc
Ce qui équivaut à 0,915 × 6,02 × 1020 cations monovalents par gramme.
Étant donné que le nombre de cations nécessaires pour équilibrer la charge de surface par unité de masse d’argile et la surface par unité de masse d’argile sont maintenant connues, la surface disponible pour chaque cation échangeable monovalent peut être calculée :
Le rayon hydraté de Na+ est estimé entre 5,6 et 7,9 Å, ce qui correspond à des zones de 98,5–196,1 Å2. La comparaison de ces zones avec la surface disponible par cation monovalent indique qu’il faut un peu plus qu’une monocouche de cations adsorbés pour équilibrer la charge de surface provoquée par une substitution isomorphe.
Un calcul similaire pour la kaolinite indique que pour cette argile la superficie est de 1075 m2 / g (Wayman, 1967). La capacité d’échange de cations pour la kaolinite se situe typiquement entre 1 et 10 meq / 100 g et, par conséquent, une monocouche de cations adsorbés satisfaisait les exigences d’équilibre de charge.
Equations d’Action de Masse
En suivant la méthodologie utilisée tout en tenant compte de nombreux autres sujets abordés dans le chapitre, nous développerons des relations quantitatives pour les processus d’échange de cations en appliquant la loi d’action de masse. Pour ce faire, on suppose que le système d’échange se compose de deux phases distinctes, la phase de solution et la phase d’échange. La phase d’échange dépend entièrement ou en partie du milieu poreux. Le processus d’échange d’ions est alors représenté simplement comme un échange d’ions entre ces deux phases,
(3.97)
Où A et B sont les ions échangeables, a et b sont le nombre de moles, et le suffixe (ad) représente l’ion adsorbé. L’absence de ce suffixe désigne un ion en solution. A partir de la loi d’action de masse,
(3.98)
Où les quantités entre parenthèses représentent des activités. Pour l’échange entre le Na+ et Ca2+, qui est très important dans de nombreux systèmes d’eaux souterraines naturelles, l’équation d’échange est
2Na+ + Ca(ad) = Ca2+ + 2Na(ad) (3.99)
(3.100)
Le rapport d’activité des ions en solution peut être exprimé en termes de coefficients d’activité et de molalité tel que
(3.101)
où les valeurs du coefficient d’activité (γA, γB) peuvent être obtenues de la manière habituelle (Section 3.2). Pour l’Éq. (3.98), il est nécessaire d’obtenir des valeurs pour les activités des ions adsorbés lors de la phase d’échange. Vanselow (1932) a proposé que les activités des ions adsorbés soient égales à leurs fractions molaires (la Section 3.2 inclut une définition de cette quantité). Les fractions molaires de A et B sont
où (A) et (B), exprimés en moles, sont des constituants adsorbés. L’expression d’équilibre devient
(3.102)
Vanselow et d’autres ont trouvé expérimentalement que pour certains systèmes d’échange impliquant des électrolytes et des argiles, est une constante. Par conséquent, est devenu le coefficient de sélectivité. Dans les cas où il ne s’agit pas d’une constante, il est appelé plus convenablement la fonction de sélectivité (Babcock, 1963). Dans de nombreuses enquêtes, les termes du coefficient d’activité définis dans l’Éq. (3.101) ne sont pas inclus. Babcock et Schulz (1963) ont montré que l’effet du coefficient d’activité peut être particulièrement important dans le cas de l’échange de cations monovalent-divalents.
Argersinger et al. (1950) ont étendu la théorie de Vanselow pour mieux tenir compte des effets des ions adsorbés. Les coefficients d’activité pour les ions adsorbés ont été introduits sous une forme analogue aux coefficients d’activité de soluté.
(3.103)
La constante d’équilibre d’action de masse, KA–B, est donc liée à la fonction de sélectivité par
(3.104)
Bien qu’en théorie, cette équation devrait fournir une méthode valable pour prédire les effets de l’échange d’ions sur les concentrations de cations dans les eaux souterraines, à l’exception notable des recherches menées par Jensen et Babcock (1973) et EI-Prince et Babcock (1975), les études d’échange de cations généralement, ne comprennent pas la détermination des valeurs K et γ(ad). L’information sur les coefficients de sélectivité est beaucoup plus fréquente dans la littérature. Pour la paire d’échange Mg2+–Ca2+, Jensen et Babcock et d’autres ont observé que le coefficient de sélectivité est constant sur de larges gammes de rapports de (Mg2+)(ad)/(Ca2+)(ad) et de force ionique. Les valeurs de sont généralement comprises entre 0,6 et 0,9. Ceci indique que Ca2+ est adsorbé préférentiellement à Mg2+.
L’intérêt pour les processus d’échange de cations dans les eaux souterraines se concentre généralement sur la question de qu’est-ce qui arrive aux concentrations de cations dans les eaux souterraines lorsque l’eau se déplace dans une zone où il existe une capacité d’échange cationique importante. Les strates qui peuvent modifier la chimie des eaux souterraines par échange de cations peuvent posséder d’autres propriétés géochimiques importantes. Pour plus de simplicité, celles-ci sont exclus de cette discussion. Lorsque les eaux souterraines d’une composition particulière se déplacent dans une zone d’échange de cations, les concentrations de cation s’adaptent à une condition d’équilibre d’échange. Les concentrations de cation à l’équilibre dépendent des conditions initiales, telles que : (1) les concentrations de cation des eaux entrant dans l’espace interstitiel, espace dans lequel l’échange se produit et (2) les fractions molaires de cations adsorbés sur les surfaces des pores immédiatement avant l’entrée des nouvelles eaux des pores. Comme chaque nouveau volume d’eau se déplace dans l’espace des pores, un nouvel équilibre est établi en réponse au nouvel ensemble de conditions initiales. Le déplacement continu des eaux souterraines dans la zone d’échange de cations peut s’accompagner d’une chimie interstitielle qui change progressivement, bien que l’équilibre des échanges dans l’eau des pores soit maintenu en tout temps. Cette condition de changement d’équilibre est particulièrement caractéristique des processus d’échange de cations dans la zone d’eau souterraine et est également associée à d’autres processus hydro-chimiques où le flux hydrodynamique provoque un remplacement continu de l’eau des pores lorsque des réactions rapides d’eau minérale se produisent.
L’exemple suivant illustre comment les réactions d’échange peuvent influencer la chimie des eaux souterraines. Considérons la réaction
(3.105)
qui conduit à
(3.106)
où est le coefficient de sélectivité, γ représente le coefficient d’activité, (Ca2+) et (Mg2+) sont des molalités, et NMg, et NCa sont les fractions molaires de Mg2+ et Ca2+ adsorbés. Au moment des forces ioniques faibles et modérées, les coefficients d’activité de Ca2+ et Mg2+ sont similaires (Figure 3.3) et l’Éq. (3.106) peut être simplifié pour
(3.107)
Dans cet exemple, l’échange se produit lorsque les eaux souterraines de faible force ionique avec des molalités Mg2+ et Ca2+ de 1 × 10–3 s’écoulent à travers une strie argileuse avec une capacité d’échange cationique de 100 meq / 100 g. Les concentrations d’autres cations dans l’eau sont insignifiantes. On suppose qu’avant l’entrée de l’eau souterraine dans la strate d’argile, les positions d’échange sur l’argile sont partagées également par Mg2+ et Ca2+. La condition d’adsorption initiale est donc NMg = NCa. Pour calculer les concentrations de cations à l’équilibre, des informations sur la porosité ou la densité de masse sèche brute de l’argile sont nécessaires. On suppose que la porosité est de 0,33 et que la densité de masse des solides est de 2,65 g / cm3. Une estimation raisonnable pour la densité de masse sèche brute est donc de 1,75 g / cm3. Il est pratique dans ce contexte d’exprimer les concentrations de cations en solution en moles par litre, ce qui, à de faibles concentrations, est identique à la molalité. Comme la porosité est de 0,33 exprimée en fraction, chaque litre d’eau dans la strate argileuse est en contact avec 2 × 103 cm3 de solides qui ont une masse de 5,3 × 103 g. Parce que la CEC est de 1 meq / g et que 1 mole de Ca2+ ou Mg2+ = 2 équivalents, 5,3 × 103 g d’argile aura un total de 5,3 équivalents, ce qui équivaut à 1,33 mol de Mg2+ adsorbé et 1,33 mol de Ca2+. On suppose que l’eau souterraine s’écoule dans de l’argile saturé d’eau et déplace totalement l’eau d’origine poreuse. Les concentrations de Ca2+ et Mg2+ dans les eaux souterraines lorsqu’elles entrent dans la strie argileuse peuvent maintenant être calculées. Une valeur de de 0,6 sera utilisée, et on supposera que le déplacement des eaux interstitielles se produit instantanément avec une dispersion hydrodynamique négligeable. Les conditions initiales sont spécifiées parce que NMg = NCa, un litre d’eau est en contact avec de l’argile qui contient 1,33 moles de Mg2+ et 1,33 moles de Ca2+ sur les sites d’échange. Par rapport aux concentrations de Mg2+ et Ca2+ dans les eaux souterraines, la couche adsorbée sur les particules d’argile est un grand réservoir de cations échangeables.
La substitution des valeurs initiales du côté droit de l’Équation (3.107) donne une valeur pour le quotient de réaction [Eq. (3.60)] :
Pour que la réaction se déroule vers l’équilibre par rapport à l’eau interstitielle, QMg-Ca doit diminuer de 0,6 pour atteindre l’état de Q = K. Cela se produit par adsorption de Ca2+ et libération de Mg2+ de la solution. L’équilibre est atteint lorsque (Ca2+) = 0,743 × 10–3, (Mg2+) = 1,257 × 10–3, NCa = 0,500743 et NMg = 0,499257. Le rapport des cations adsorbés n’est pas modifié de manière significative, mais le rapport (Mg2+)/(Ca2+) pour les espèces dissoutes est passé de 1 à 1,7. Si les eaux souterraines continuent de s’écouler à travers la strate argileuse, les concentrations de cation resteront à l’équilibre comme indiqué ci-dessus jusqu’à ce qu’un nombre suffisant de volumes de pores passent pour que le rapport des cations adsorbés change graduellement. Finalement, le rapport NMg/NCa diminue pour une valeur de 0,6, moment auquel l’argile ne sera plus capable de modifier les concentrations de Mg2+ et Ca2+ des eaux souterraines entrantes. Si la chimie de l’eau d’entrée change, l’état d’équilibre régulier ne sera pas atteint.
Cet exemple illustre la nature dynamique des équilibres d’échange de cations. Étant donné que les réactions d’échange entre les cations et les argiles sont généralement rapides, on peut s’attendre à ce que les concentrations de cations dans les eaux souterraines soient en équilibre d’échange, mais des milliers de milliers de volumes de pores peuvent passer par le milieu poreux avant que le rapport des cations adsorbés ne s’ajuste complètement à l’eau d’entrée. Selon les conditions géochimiques et hydrologiques, des délais de millions d’années peuvent être nécessaires pour que cela se produise.
L’échange impliquant des cations de même valence se caractérise par la préférence pour l’un des ions si le coefficient de sélectivité est supérieur ou inférieur à l’unité. L’ordre normal de préférence pour certains cations monovalents et divalents pour la plupart des argiles est
Affinité pour l’absorption
Cs+ > Rb+ > K+ > Na+ > Li+
fort faible
Ba2+ > Sr2+ > Ca2+ > Mg2+
Les ions divalents ont généralement une capacité d’adsorption plus forte que les ions monovalents, bien que cela dépende dans une certaine mesure de la nature de l’échange et de la concentration des solutions (Wiklander, 1964). Les deux séquences d’affinité se déroulent dans la direction de l’augmentation des rayons ioniques hydratés, avec une adsorption plus forte pour les plus petits ions hydratés et l’adsorption la plus faible pour les ions les plus importants. Il faut toutefois garder à l’esprit que la direction dans laquelle se déroule une réaction d’échange de cations dépend également du rapport des fractions molaires adsorbées à l’état initial et du rapport de concentration des deux ions en solution. Par exemple, si l’on considère la condition d’échange de Mg-Ca utilisée dans les calculs d’équilibre présentés ci-dessus mais en modifiant la condition initiale des ions adsorbés à NMg = 0,375 et NCa = 0,625, il n’y aurait pas de changement dans les concentrations de Mg2+ et Ca2+ comme eaux souterraines traversant l’argile. Si les conditions initiales d’ions adsorbés étaient telles que le rapport NMg/NCa fut inférieur à 0,6, la réaction d’échange se déroulerait en sens inverse [vers la droite dans l’Équation (3.105)], ce qui ferait diminuer le rapport (Mg2+)/(Ca2+). Ceci indique que, pour déterminer la direction dans laquelle une réaction d’échange d’ions se déroulera, il faudra plus d’informations que la série d’affinité d’adsorption simple présentée ci-dessus.
Les réactions d’échange de cations les plus importantes dans les systèmes d’eaux souterraines sont celles impliquant des cations monovalents et divalents tels que Na+–Ca2+, Na+–Mg2+, K+–Ca2+, et K+–Mg2+.
Pour les réactions suivantes,
2A+ + B(ad) = B2+ + 2A(ad) (3.108)
(3.109)
La réaction d’échange de Na+-Ca2+ revêt une importance particulière lorsqu’elle se produit dans les argiles montmorillonitiques (smectite) car elle peut entraîner de grands changements de perméabilité. Les argiles du groupe de la montmorillonite peuvent se développer et se contracter en réponse à des changements dans la composition du cation adsorbé entre les plaquettes d’argile. Les rayons hydratés de Na+ et Ca2+ sont tels que deux Na+ hydratés nécessitent plus d’espace qu’un Ca2+. Par conséquent, le remplacement du Ca2+ par Na+ sur les sites d’échange entraîne une augmentation de la dimension du réseau cristallin. Il en résulte une diminution de la perméabilité. Ceci peut entraîner une dégradation de la productivité agricole des sols.
3.8 Les isotopes environnementaux
Depuis le début des années 1950, les isotopes naturels qui existent dans l’eau et dans le cycle hydrologique ont été utilisés dans les enquêtes sur les analyses des eaux souterraines et les eaux de surfaces. Dans ces études, l’importance primordiale est le tritium (3H) et le carbone 14 (14C) qui sont radioactifs ainsi que l’oxygène 18 (18O) et le deutérium (2H), qui sont non radioactif (Tableau 3.1). Ces derniers sont connus sous le nom d’isotopes stables. Le tritium et le deutérium sont souvent représentés par T et D respectivement. 3H et 14C sont utilisés comme guide d’âge des eaux souterraines.18O et 2H sont utilisés principalement comme les indicateurs des eaux souterraines, des zones sources et les indicateurs d’évaporation dans les eaux de surface.
Dans ce texte, ces quatre isotopes sont les seuls isotopes environnementaux pour lesquels des applications hydrogéologiques sont décrites. Pour des discussions sur la théorie et l’hydrologie où l’utilisation hydrochimie d’autres isotopes naturels tels que le carbone 13, azote 15, et soufre 34, le lecteur est référé à Back et Hanshaw (1965), Kreitler et Jones (1975) et Wigley (1975). Il existe de nombreuses situations où les données isotopiques peuvent fournir des informations hydrologiques précieuses qui ne pourraient en aucun cas être obtenues. Les techniques sophistiquées pour la mesure des isotopes précités dans l’eau sont disponibles depuis plusieurs décennies, au cours desquels le temps de l’utilisation de ces isotopes dans les études sur les eaux souterraines a progressivement augmenté.
Carbone 14
Avant l’avènement des grands tests thermonucléaires au-dessus de la surface en 1953, le carbone 14 (14C) dans l’atmosphère global a été entièrement dérivé du processus naturel de transmutation de l’azote causé par le bombardement des rayons cosmiques. Cette production de 14C a été estimée à environ 2,5 atomes / s • cm2 (Lal et Suess, 1968). L’oxydation du CO2 se produit rapidement, suivi d’un mélange avec le réservoir atmosphérique du CO2. La concentration à l’état stationnaire du 14C dans l’atmosphère est d’environ un atome de 14C dans 1012 atomes de carbone 12C ordinaire. Les études sur le contenu du 14C des anneaux d’arbre indiquent que cette concentration de 14C n’a variée que légèrement au cours des 7 000 dernières années. D’autres preuves suggèrent qu’il n’y a pas eu de changements majeurs dans l’atmosphère du 14C au cours des dernières décennies.
La loi de la désintégration radioactive décrit le taux auquel l’activité du 14C et toutes les autres substances radioactives diminuent avec le temps. Ceci est exprimé comme :
A = A02–t/T (3.110)
où A0 est le niveau de radioactivité à un moment initial, A le niveau de radioactivité après le temps t, et T la demi-vie de l’isotope. Cette loi, conjointement avec les mesures de la teneur en 14C des eaux souterraines peuvent servir de guide d’âge aux eaux souterraines. Dans ce contexte, le terme âge se réfère à la période qui s’est écoulée depuis que l’eau s’est déplacée assez profondément dans la zone d’eau souterraine pour être isolée de l’atmosphère terrestre.
L’utilisation du 14C pour la datation des eaux souterraines a été proposée pour la première fois par Münnich en 1957, suite au développement de techniques de datation du 14C des solides carbonés et des matériaux initiés par le lauréat du prix Nobel W.F. Libby, en 1950. Quand l’eau se déplace en dessous de la nappe phréatique et est isolée du réservoir terrestre de CO2, la désintégration radioactive entraîne une diminution progressive du contenu de 14C du carbone dissous. L’expression pour la désintégration radioactive [Eq. (3.110)] peut être réarrangée, et lors de la substitution de T = 5 730 années
(3.111)
où A0 est l’activité spécifique (désintégration par unité de temps par unité de masse de l’échantillon) de carbone 14 dans l’atmosphère terrestre, A l’activité par unité de masse de l’échantillon, et T l’âge de désintégration du carbone. Dans les enquêtes sur les eaux souterraines les déterminations du 14C sont fabriquées sur des échantillons de carbone inorganique qui sont extraits des échantillons des eaux souterraines qui varient généralement en volume de 20 à 200 ℓ. La masse de carbone nécessaire pour une analyse précise par des méthodes normales est d’environ 3 g. Les valeurs de 14C obtenu de cette manière sont une mesure du contenu du 14C de CO2 (aq), H2CO3, CO32–, et dans l’eau au moment de l’échantillonnage. Le 14C peut également être présent dans le carbone organique dissous tel que les acides fulviques et humiques, mais cette source de 14C est petite et n’est normalement pas inclue dans les études sur l’âge des eaux souterraines.
L’activité spécifique du 14C dans le carbone qui était en équilibre avec l’atmosphère de la terre avant les essais atmosphériques des dispositifs thermonucléaires est environ de 10 désintégrations par minute par gramme (dpm / g). L’équipement moderne pour la mesure du 14C, peut détecter des niveaux d’activité du 14C aussi bas qu’approximativement de 0,02 dpm / g. La substitution de ces activités spécifiques dans l’Équation (3.111) donne un maximum d’âge de 50 000 ans. Il faut souligner qu’il s’agit d’un âge apparent du carbone inorganique dissous. Pour obtenir des informations hydrologiques utiles à partir de ce type de données, il est nécessaire de déterminer la source du carbone inorganique. La calcite ou la dolomie se produisent dans de nombreux environnements dans les eaux souterraines. Le carbone qui entre dans les eaux souterraines par dissolution de ces minéraux peut provoquer une dilution du 14C contenu dans l’ensemble du carbone inorganique présent dans l’eau. C’est le cas parce que dans la plupart des eaux souterraines, les systèmes de calcite et de dolomie sont beaucoup plus anciens que 50 000 ans. Leur carbone est donc dépourvu de quantités importantes de 14C et est souvent appelé carbone « mort ». Pour obtenir des estimations du 14C de l’âge actuel dans l’eau souterraine, il est nécessaire de déterminer dans quelle mesure ce carbone mort a réduit le parent du 14C contenu dans cette eau. Une indication de la façon dont cela peut être fait est décrite au Chapitre 7.
Le Tritium
L’apparition du tritium dans les eaux à travers le cycle hydrologique provient des deux sources naturelle et artificielle. D’une manière similaire à celle de la production de 14C, le 3H est produit naturellement dans l’atmosphère terrestre par l’interaction des neutrons produits par les rayons cosmiques avec de l’azote. Lal et Peters (1962) ont estimés que le taux de production atmosphérique est de 0,25 atomes / s • cm2. En 1951, Van Grosse et ses collègues ont découvert que 3H apparait naturellement dans les précipitations. Deux ans plus tard, de grandes quantités de tritium artificiel sont entrées dans le cycle hydrologique en raison de tests à grande échelle dans l’atmosphère de bombes thermonucléaires. Malheureusement, peu de mesures de tritium naturel dans les précipitations ont été effectués avant que la contamination atmosphérique n’ait eu lieu. On estime qu’avant l’initiation des tests atmosphériques en 1952, la teneur naturelle en tritium des précipitations était d’environ de 5 à 20 unités de tritium (Payne, 1972). Une unité de tritium est l’équivalent de 1 atome de tritium dans 1018 atomes d’hydrogène. Comme la demi-vie du 3H est de 12,3 ans, les eaux souterraines qui ont été rechargées avant 1953 devraient donc avoir des concentrations de 3H inférieures d’environ 2-4 TU. La première source majeure de 3H fabriqué par l’homme est entrée dans l’atmosphère lors des tests initiaux des grands dispositifs thermonucléaires en 1952. Ces tests étaient suivis de tests supplémentaires en 1954, 1958, 1961 et 1962 avant le moratoire sur les essais atmosphériques convenus par les États-Unis et l’URSS.
Depuis le début des essais thermonucléaires, la teneur en tritium dans les précipitations a été surveillée à de nombreux endroits dans l’hémisphère nord et à un nombre plus petit mais significatif d’emplacements dans l’hémisphère sud. Considérant les données séparées par hémisphères, il existe un fort parallélisme en concentration 3H avec le temps, bien que les valeurs absolues varient d’un endroit à l’autre (Payne, 1972). Dans l’hémisphère sud, les valeurs du 3H sont beaucoup plus faibles en raison du plus grand rapport de l’aire océanique sur la superficie terrestre. Le plus long record continu la concentration du 3H dans les précipitations provenant d’Ottawa, au Canada, où l’échantillonnage a débuté en 1952. L’enregistrement du 3H en fonction du temps pour cet emplacement est illustré à la Figure 3.11. Les tendances affichés dans ce graphique sont représentatives des tendances 3H enregistrées ailleurs dans l’hémisphère Nord. Les données du tritium obtenues par L’Agence International de l’Energie Atomique (AIEA) à partir d’un réseau d’échantillonnage global permettent l’estimation du 3H par rapport aux tendances du temps pour les zones où il n’y a pas de stations d’échantillonnage ou seulement les dossiers à court terme. À une latitude donnée, les concentrations de tritium dans les précipitations dans les stations d’échantillonnage près de la côte sont plus basses que sur les terres à cause de la dilution de la vapeur d’eau océanique, faible en tritium.
Les mesures des concentrations de tritium peuvent être une aide précieuse dans de nombreux types d’enquêtes sur les eaux souterraines. Si un échantillon d’eau souterraine provenant d’un lieu de l’hémisphère Nord contenant du tritium à des concentrations de centaines ou des milliers de TU, il est évident que l’eau, ou au moins une grande partie de l’eau est entrée dans la zone souterraine quelques temps après 1953. Si l’eau a moins de 5-10 TU, il doit être originaire d’avant les années 1953. En utilisant des méthodes de routine de mesure des échantillons à faible teneur en tritium dans l’eau, les concentrations faibles comme environ 5-10 TU peuvent être détectées.
En utilisant des méthodes spéciales pour la concentration du 3H à partir d’échantillons d’eau, des valeurs aussi faibles qu’environ 0,1 TU peuvent être mesuré. Si les échantillons ne contiennent aucun 3H détectable dans les mesures de routine, il est généralement raisonnable de conclure que des quantités importantes d’eau post-1953 ne sont pas présentes. L’eau post-1953 est souvent désignée comme l’eau moderne ou l’eau de l’eau de la bombe à tritium.
Les données du tritium provenant des modèles d’échantillonnage détaillés peuvent parfois être utilisées pour distinguer les différentes zones d’âge pour les eaux moderne des systèmes d’eaux souterraines. Pour ce type d’utilisation de tritium, le réglage stratigraphique devrait être simple pour que les schémas d’écoulement complexes n’empêchent pas l’identification des tendances de tritium. Dans les situations où les concentrations de 3H de deux zones d’écoulement adjacentes sont bien définies, les données de tritium peuvent être utiles pour distinguer les zones de mélange. L’utilité du tritium dans les études sur les eaux souterraines est renforcée par le fait qu’il n’est pas affecté de manière significative par des réactions autres que la désintégration radioactive.
Oxygène et Deutérium
Avec l’avènement du spectromètre de masse, il est devenu possible au début des années 1950 d’effectuer des mesures rapides et précises des rapports isotopiques. Un intérêt particulier pour les hydrologues est le rapport des isotopes principaux qui composent la molécule d’eau, 18O / 16O et 2H / 1H. Les rapports isotopiques sont exprimés en unités delta (∂) pour mille (parties pour mille ou ‰), dont les différences sont relatives à une norme arbitraire connue sous le nom de standard mean ocean water (SMOW) :
∂‰ = [(R – Rstandard)/Rstandard] × 1000 (3.112)
où R et Rstandard sont les rapports isotopiques, 2H / 1H ou 18O / 16O de l’échantillon représentant respectivement la norme. La précision de la mesure est habituellement meilleure que ±0.2‰ et ±2‰ pour ∂18O et ∂2H, respectivement.
Les différentes formes isotopiques de l’eau ont des pressions de vapeur et points de congélation légèrement différentes. Ces deux propriétés donnent lieu à des différences de concentrations de 18O et 2H dans l’eau des diverses parties du cycle hydrologique. Le processus selon lequel la teneur en isotope d’une substance change en raison de l’évaporation, de la condensation, le gel, la fusion, les réactions chimiques ou les processus biologiques est connu sous le nom de fractionnement isotopique. Lorsque l’eau s’évapore des océans, la vapeur d’eau produite est divisée en 18O et 2H par rapport à l’eau de l’océan, d’environ 12-15 %; dans 18O et 80–120‰ dans 2H. Lorsque la vapeur d’eau se condense, la pluie ou la neige se forme à des concentrations plus élevées de 18O et 2H que la vapeur d’eau restante. Comme la vapeur d’eau qui se déplace vers l’intérieur des terres dans le cadre de la circulation atmosphérique régionale ou continue dans les systèmes, et comme le processus de condensation et de précipitation sont répétées plusieurs fois, la pluie ou la neige se caractérisent par de faibles concentrations en isotopes lourds 18O et 2H. La teneur en 18O et 2H des précipitations à un moment donné à une localité dépend d’une manière générale de l’emplacement de la masse terrestre continentale, et plus précisément de la condensation des précipitations provenant de la vapeur d’eau atmosphérique. Puisque la condensation et le fractionnement de l’isotope dépendent de la température, la composition isotopique de la précipitation dépend également de la température. L’effet combiné de ces facteurs est que, en (1) il existe de fortes tendances continentales dans la composition isotopique annuelle moyenne de précipitation, en (2) il existe une forte variation saisonnière des valeurs isotopiques moyennes dans le temps et la composition des précipitations à un endroit donné, et (3) la composition isotopique de la pluie ou de la neige lors d’un événement de précipitation individuel est très variable et imprévisible. Dans les régions continentales, les valeurs de pluie peuvent varier d’environ 0 à -25 % pour 18O et de 0 à -150 % pour 2H, bien que variations des valeurs annuelles moyennes soient faibles. En raison des changements de température dans la zone de de condensation atmosphérique ou des effets de diminution isotopique, de grandes variations peuvent tout de même se produire lors d’événements pluvieux localisés. Des changements peuvent également se produire au sein de la goutte de pluie pendant sa chute, surtout au début d’une tempête et dans des régions arides ou semi-arides.
Dans les zones profondes du sous-sol où les températures sont supérieures à 50-100 °C, les teneurs en 18O et en 2H des eaux souterraines peuvent être modifiées de manière significative à la suite d’interactions chimiques avec la roche hôte. Dans les eaux souterraines peu profondes avec des niveaux normaux les températures, les concentrations de ces isotopes sont peu ou pas affectées par processus chimiques. Dans ces régimes d’écoulement, 18O et 2H ne sont pas réactifs, se présentant comme des traceurs naturels ayant des concentrations déterminées par la composition isotopique de la précipitation qui tombe sur la surface du sol et par l’évaporation qui se produit avant que l’eau ne pénètre au-dessous de la partie supérieure de la zone du sol. Une fois que l’eau se déplace en-dessous de la partie supérieure de la zone du sol, les concentrations de 18O et 2H deviennent une propriété caractéristique de la masse d’eau souterraine, qui, pour de nombreux paramètres hydrogéologiques, permettent de déterminer les zones sources et les modèles de mélange par l’échantillonnage et l’analyse pour ces isotopes.
Les concentrations de 2H et de 18O obtenues à partir d’enquêtes de précipitations mondiales sont en corrélation selon la relation (Dansgaard, 1964)
∂2H‰ = 8∂18O‰ + 10 (3.113)
cette relation est connue sous le nom de droite de l’eau météorique. Les corrélations linéaires avec les coefficients seulement légèrement différents sont obtenues à partir des études des précipitations locales. Quand l’eau s’évapore des sols ou des eaux de surface dans des conditions naturelles, elle s’enrichie en 18O et 2H. Le degré d’enrichissement relatif est différent de l’enrichissement qui se produit pendant la condensation. Le rapport ∂18O / ∂2H pour la précipitation partiellement évaporée est supérieure au rapport normal de la précipitation obtenue à partir de l’Équation (3.113). L’écart des concentrations de 18O et 2H de la ligne d’eau météorique est une caractéristique des isotopes qui peuvent être utilisés dans une multitude d’enquêtes hydrologiques, y compris les études sur l’influence des eaux souterraines, sur l’équilibre hydrologique des lacs et des réservoirs et sur les effets de l’évaporation sur l’infiltration.
3.9 Mesures de terrain des paramètres énonces
La description des techniques de laboratoire qui sont employées dans l’analyse chimique ou isotopique des échantillons d’eau est au-delà de la portée de ce texte. Pour ce type d’information le lecteur est renvoyé à l’agence de protection Rainwater et Thatcher (1960) et l’Agence de Protection environnementale des Etats-Unis (1974b). Notre but ici est de décrire brièvement les méthodes par lesquelles plusieurs paramètres importants énoncés sont mesurés dans des investigations de terrain. Ces paramètres sont la conductivité électrique, le pH, le potentiel redox et l’oxygène dissous. Dans le cas des eaux souterraines, les études de chacun de ces paramètres peuvent être effectuées sur le terrain en immergeant des sondes dans les échantillons d’eau ou par l’immersion des sondes dans les puits ou piézomètres.
La conductivité électrique est la capacité d’une substance à conduire un courant électrique. Elle a pour unité des ohmmètres réciproques, dénotés dans le système de SI comme Siemens par mètre (S/m). La conductivité électrique est la conductivité d’un corps ou d’une masse de fluide d’unité de longueur et de surface à une température donnée. Dans la littérature sur les eaux souterraines, la conductivité électrique a été couramment rapportée en tant que milliohms réciproques ou microohms réciproques, connus sous le nom de millimhos et micromhos. Dans le système de SI, 1 millimhos est dénoté comme 1 millisiemen (mS) et 1 micromhos comme 1 microsiemen (μS).
L’eau liquide pure a une conductibilité électrique très basse, moins qu’un dixième de microsiemens à 25 °C (bord, 1970). La présence de l’espèce ionique chargée en solution rend la solution conductrice. Puisque les eaux normales contiennent une variété d’espèces ioniques et non chargées dans diverses quantités et proportions, les déterminations de conductibilité ne peuvent pas être employées pour obtenir des évaluations précises des concentrations d’ion ou la totalité des solides dissous. Comme indication générale des solides dissous totaux (TDS), des valeurs spécifiques de conductibilité sont souvent utiles d’une façon pratique. Pour la conversion entre les valeurs de conductibilité et le TDS, la relation suivante est employée (Hem, 1970) :
TDS = AC(3.114)
où C est la conductibilité en microsiemens ou en micromhos, le TDS est exprimé en g/m3 ou mg/ℓ, et A est un facteur de conversion. Pour la plupart des eaux souterraines, A est entre 0,55 et 0,75, selon la composition ionique de la solution.
Des mesures de la conductivité électrique peuvent être faites sur le terrain simplement en immergeant un conductimètre dans des échantillons d’eau ou en la faisant descendre dans un puits et en enregistrant alors la conductibilité sur un galvanomètre. L’équipement robuste qui est adapté à l’utilisation sur le terrain est disponible auprès de nombreux fournisseurs. Dans les études sur les eaux souterraines, des mesures de conductibilité sont généralement faites sur le terrain de sorte que des variations des solides dissous puissent être déterminées sans retard associé au transport des échantillons au laboratoire. Comme les distributions des valeurs de conductivité des eaux souterraines sont tracées sur le terrain, les campagnes d’échantillonnage peuvent être ajustées pour tenir compte des anomalies ou les tendances qui peuvent être identifiées comme procédés de travaux de terrain.
Pour éviter des changements provoqués par l’évaporation du CO2 de l’eau, les mesures de pH des eaux souterraines sont normalement faites sur le terrain juste après la collection de l’échantillon. Le dioxyde de carbone dans les eaux souterraines apparait normalement à une pression partielle beaucoup plus élevée que dans l’atmosphère de la terre. Quand les eaux souterraines sont exposées à l’atmosphère, le CO2 s’échappe et le pH augmente. La valeur de la variation de pH pour une diminution indiquée de PCO2 peut être calculée en utilisant les méthodes décrites dans la Section 3.3. Pour les mesures de pH sur le terrain, des pH mètres portatifs et des électrodes sont généralement utilisés. Des échantillons sont habituellement apportés vers la surface par pompage ou au moyen d’échantillonneurs de profondeur plutôt qu’en insérant des électrodes dans le puits. Une description détaillée de la théorie et des méthodes de mesure de pH dans l’eau sont présentées par Langmuir (1970).
L’oxygène dissous est un autre paramètre hydro-chimique important qui est généralement mesuré sur le terrain en immergeant une petite sonde dans des échantillons d’eau ou dans les puits. Dans une sonde d’oxygène dissous, les molécules de gaz de l’oxygène se diffusent à travers une membrane dans une cellule de mesure à un taux proportionnel à la pression partielle de l’oxygène dans l’eau. À l’intérieur de la sonde, l’oxygène réagit avec un électrolyte et est réduit par une tension appliquée. Le courant qui est produit est directement proportionnel à la pression partielle de l’oxygène dans l’eau en dehors de la sonde (Back et Hanshaw, 1965). Les sondes d’oxygène dissous robuste qui se relient aux mètres portatifs sont disponibles dans le commerce. Ces sondes peuvent être immergées dans les puits ou des piézomètres pour obtenir les mesures qui sont représentantes des conditions in situ. L’oxygène dissous peut également être mesuré sur le terrain par une technique de titration connue sous le nom de méthode de Winkler (Agence de Protection de l’Environnement des Etats-Unis, 1974b).
Les sondes d’oxygène dissous du type qui sont généralement employées ont une limite de détection d’environ 0,1 mg/ℓ. Les sondes à haute précision peuvent mesurer l’oxygène dissous aux niveaux aussi bas que 0,01 mg/ℓ. Même des niveaux d’oxygène dissous proche de ces limites de détection, les eaux souterraines peuvent avoir assez d’oxygène pour fournir des possibilités considérables pour l’oxydation de beaucoup de types de constituants réduits. Les valeurs de Eh ou pE peuvent être calculées à partir des valeurs mesurées d’oxygène dissous au moyen d’Eq. (3.77). La concentration de l’oxygène dissous est convertie en PO2, en utilisant la loi d’Henry (PO2, = O2 dissous / KO2), où KO2 à 25 °C est 1,28 × 10–3 mol/bar). À pH 7, les valeurs de pE obtenues de cette manière employant des valeurs d’oxygène dissous aux limites de détection indiquées ci-dessus sont 13,1 et 12,9, ou exprimées comme Eh, 0,78 et 0,76 V, respectivement. Le schéma 3.10 indique que ces valeurs sont près de la limite supérieure du domaine de pE-pH pour l’eau. Si l’eau est saturée avec de l’oxygène dissous (c.-à-d., à l’équilibre avec l’oxygène dans l’atmosphère de la terre), le pE calculé est de 13,6. Pour des valeurs de pE calculées à partir des concentrations d’oxygène dissous pour servir d’indication réel de l’état redox de l’eau, l’oxygène dissous doit être l’espèce oxydante de contrôle dans l’eau avec des états redox ou proches de l’équilibre. La mesure des valeurs d’autres constituants dissous multivalents peuvent également être employées pour obtenir une évaluation de l’état redox des eaux souterraines. Une discussion additionnelle sur ce sujet est inclus en Chapitre 7.
Une autre approche pour obtenir une évaluation de l’état redox des eaux souterraines est de mesurer le potentiel électrique dans l’eau en utilisant un système d’électrode qui inclut une électrode métallique inerte (le platine est généralement employé). Les systèmes d’électrode connus sous le nom de sonde Eh sont disponibles dans le commerce. Pour enregistrer le potentiel électrique, ils peuvent être fixés aux mêmes sondes utilisés pour le pH. Pour que ces lectures soient significatives, les sondes doivent être plongées dans des puits ou des piézomètres ou être placées dans des flacons d’échantillonnage qui empêchent l’invasion d’air. Pour quelques eaux souterraines, les potentiels mesurés de cette manière sont une indication des conditions redox, mais dans beaucoup de cas ils ne sont pas. Des discussions détaillées sur la théorie et la significativité de l’approche d’électrode aux mesures redox sont fournies par Stumm et Morgan (1970) et Whitfield (1974).
Lectures suggérées
BLACKBURN, T. R. 1969. Equilibrium, A Chemistry of Solutions. Holt, Rinehart et Winston, New York, pp. 93–111.
GARRELS, R. M., et C. L. CHRIST. 1965. Solutions, Minerals, et Equilibria. Harper & Row, New York, pp. 1–18, 50–71.
KRAUSKOPF, K. 1967. Introduction to Geochemistry. McGraw-Hill, New York, pp. 3–23, 29–54, 206–226, 237–255.
STUMM, W., et J. J. MORGAN. 1970. Aquatic Chemistry. Wiley-Interscience, New York, pp. 300–377.
Exercices
Dans les exercices énumérés ci-dessous pour lesquels des calculs sont nécessaires, négliger l’apparition d’associations d’ions ou de complexes tels que , , , , et . L’information qui peut être obtenue à partir de certaines des figures de ce texte devrait servir de guide dans plusieurs des exercices.
- Une analyse en laboratoire indique que le carbone total inorganique dissous dans un échantillon d’eau aquifère est de 100 mg/ℓ (exprimé en C). La température dans l’aquifère est de 15 °C, le pH est de 7,5, et la force ionique est de 0,05. Quelles sont les concentrations de H2CO3, CO32–, et et la pression partielle de CO2 ? Le PCO2 est-il dans la gamme commune aux eaux souterraines ?
- L’eau saline est injectée dans un aquifère confiné par une roche imperméable à la base et une couche d’argile dense non fissurée sur un toit de 10 m d’épaisseur. Une aquifère d’eau douce se trouve au-dessus de cet aquitard. Le contenu en Cl– de l’injection l’eau est de 100 000 mg/ℓ. Estimez la durée requise pour Cl– pour se déplacer par diffusion moléculaire à travers l’aquitard argileux dans l’aquifère d’eau douce. Exprimez votre réponse en fonction d’un éventail de temps qui raisonnable à la lumière des informations disponibles. Supposons que la vitesse du débit hydraulique à travers l’argile est insignifiante par rapport au taux de diffusion.
- Deux couches de grès horizontal perméables dans un bassin sédimentaire profond sont séparées par une couche de 100 m d’épaisseur de schiste montmorillonitique non fissuré. L’une des strates de grès a un total de solides dissous de 10 000 mg/ℓ ; l’autre a 100 000 mg/ℓ. Estimez la plus grande différence de potentiel qui pourrait se développer, dans les conditions hydrodynamiques favorables, à travers le schiste à la suite de l’effet de l’osmose (pour l’activité de l’eau dans les solutions salines, voir Robinson et Stokes, 1965). Le système a une température de 25 °C. Quels sont les facteurs qui régissent la différence de potentiel réelle qui se développerait ?
- L’eau de pluie s’infiltre dans un dépôt de sable composé de quartz et de feldspath. Dans la zone du sol, l’eau est en contact avec l’air du sol qui a une pression partielle de 10-1,5 bar. Le système a une température de 10 °C. Estimez le pH de l’eau du sol. Supposons que les réactions entre l’eau et le sable sont si lentes qu’ils n’influencent pas de manière significative la chimie de l’eau.
- Les résultats d’une analyse chimique des eaux souterraines sont les suivants (exprimés en mg/ℓ) : K+ = 5.0, Na+ = 19, Ca2+ = 94, Mg2+ = 23, = 334, Cl– = 9, et SO42– = 85 ; pH 7,21 ; température 25 °C. Déterminer l’indice de saturation à la lumière de la calcite, de la dolomie et du gypse. L’échantillon d’eau provient d’un aquifère composé de calcite et de dolomie. L’eau est-elle capable de dissoudre l’aquifère ? Expliquer.
- Est-ce qu’il existe des preuves indiquant que l’analyse chimique énumérée dans l’exercice 5 contient des erreurs qui rendraient l’analyse inacceptable en ce qui concerne la précision de l’analyse ?
- L’eau souterraine, à une température de 25 °C et une PCO2 de 10–2 bar, s’écoule à travers une strate riche en gypse et devient saturée de gypse. L’eau se déplace alors dans un aquifère calcaire et dissout la calcite en saturation. Évaluer la composition de l’eau dans le calcaire après que la calcite soit dissoute et à l’équilibre. Supposons que le gypse ne se précipite pas lorsque la calcite se dissout.
- Un échantillon d’eau d’un aquifère à une température de 5 °C a la composition suivante (exprimée en mg/ℓ) : K+ = 9, Na+ = 56, Ca2+ = 51, Mg2+ = 104, = 700, Cl– = 26, et SO42– = 104 ; pH 7,54. Le pH a été obtenu à partir d’une mesure effectuée in-situ immédiatement après l’échantillonnage. Si l’échantillon est autorisé à s’équilibrer avec l’atmosphère, estimer ce que sera le pH. (Astuce : le PCO2 de l’atmosphère terrestre est de 10–3,5 bar, supposons que la calcite et d’autres minéraux ne précipitent pas à un taux significatif d’équilibration comme il se produit par rapport à l’atmosphère terrestre).
- Les mesures sur le terrain indiquent que l’eau dans un aquifère non confiné a un pH de 7,0 et une concentration en oxygène dissous de 4 mg/ℓ. Estimez le pE et Eh de l’eau. Supposons que le système redox soit à l’équilibre et que l’eau soit à 25 °C et 1 bar.
- L’eau décrite dans l’exercice 9 a une teneur en de 150 mg/ℓ. Si la concentration total du fer est régie par des équilibres impliquant FeCO3(s) et Fe(OH)3(s), estimer les concentrations de Fe3+ et Fe2+ dans l’eau. Quelle sont les sources potentielles d’erreur dans vos estimations ?
- Un échantillon d’eau a une conductance spécifique de 2 000 μS à une température de 25 °C. Évaluer le taux de solides dissous et la force ionique de l’eau. Présentez votre réponse comme une gamme dans laquelle vous vous attendez à ce que les valeurs du TDS et de I se produisent.
- Les eaux souterraines ont la composition suivante (exprimée en mg/ℓ) : K+ = 4, Na+ = 460, Ca2+ = 40, Mg2+ = 23, = 1 200, Cl– = 8, et SO42– = 20 ; pH 6,7. Quelle est la quantité d’eau à collecter pour obtenir suffisamment de carbone pour une détermination 14C par des méthodes normales ?
- Calculer le PCO2 pour l’eau décrite dans l’exercice 12. Le PCO2 est bien au-dessus du PCO2 pour l’atmosphère terrestre et est au-dessus de la gamme normale pour la plupart des eaux souterraines. Suggérer une raison pour le PCO2 élevé.
- Dans la gamme de pH normale des eaux souterraines (6-9), quels sont les espèces dominantes dissoutes du phosphore ? Expliquer pourquoi.
- Tracer le graphe du pourcentage des occurrences de par rapport au pH de manière similaire à celle de la Figure 3.5 pour les espèces de sulfure dissous (HS–, S2–, H2S) dans l’eau à 25 °C.
- Les mesures radiométriques d’un échantillon de carbone inorganique provenant de l’eau de puits indique une activité 14C de 12 désintégrations par minute (dpm). L’activité de fonds est de 10 dpm. Quel est l’âge apparent de l’échantillon ?
- L’eau souterraine à 5 °C a un pH de 7,1. L’eau est-elle acide ou alcaline ?
- La précipitation de la calcite dans les zones situées sous la nappe phréatique (i.e. conditions de système fermé) provoque l’élévation ou la chute du pH de l’eau ? Expliquer.